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AU SPITZBERG.

on remit comme on put dans les malles défoncées tout ce qui s’en était échappé, et, après avoir passé deux câbles sous la caisse, on la hissa jusque sur le chemin ; ensuite on y attela un cheval et on la mena au pas. Quant à nous, il nous fallut faire à pied les trois lieues qui nous séparaient encore de Laurgaard,

J’y arrivai dans un état de malaise indicible ; depuis que tout danger était passé, je sentais mieux les douleurs de mes meurtrissures, et j’eusse en ce moment payé bien cher le bonheur de quelques jours de repos ; mais il ne nous était pas permis de nous arrêter au delà du temps nécessaire au raccommodage de nos roues et au remplacement de notre timon, brisé dans la chute ; cela se fit rapidement, car, le soir même de ce jour néfaste, je remontais en voiture avec l’intention de courir toute la nuit pour réparer ce temps d’arrêt. Cette détermination, prise en une autre saison, eût pu nous exposer à de nouveaux et sérieux dangers ; mais heureusement la nuit dure peu en Norwége au mois de juin, et à dix heures du soir, lorsque nous repartîmes, la lumière était encore très-suffisante pour distinguer tous les objets.

La poste d’après Laurgaard se nomme Hougen ; j’aspirais à y arriver afin d’obtenir un verre de lait pour calmer mon ardente soif ; je fus désappointée. Hougen n’était pas même un gaard. Lorsque la voiture s’arrêta, je ne vis aucune habitation loin ou près de nous ; les chevaux nous attendaient près d’un poteau au milieu de la route, gardés par un enfant de treize à quatorze ans, maigre, pâle, chétif, à la phy-