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AU SPITZBERG.

prêt pour notre départ ; j’avais, je vous l’ai dit, repris mon costume masculin, et on m’engagea à y ajouter une paire de grosses bottes de postillon ; je les chaussai par-dessus les miennes, afin de me garantir le mieux possible de la boue liquide des marais.

Notre caravane était ainsi disposée : trois de nos chevaux servaient de montures pour mon mari, notre domestique français et moi ; le quatrième portait la tente, une vraie tente de soldat en grosse toile, avec un bâton au milieu et des trous en bas tout autour pour y passer des pieux ; les deux autres portaient nos provisions de conserves et de biscuit de mer, un peu de linge, des chaussures de rechange et la marmite de fonte qui devait être toute notre batterie de cuisine pendant longtemps. Ces pauvres animaux se trouvaient ainsi fort chargés ; aussi chacun de nous prit-il derrière lui, en guise de valise, un sac de cuir contenant les objets indispensables à la toilette, le manteau et la peau de renne qui devaient lui servir de matelas et de couverture pendant la route.

Je fis avec regret mes adieux à nos colons anglais ; de leur côté ils me témoignèrent le même sentiment, et huit ou dix d’entre eux voulurent nous accompagner pendant quelques milles. Lorsque nous fîmes halte pour nous séparer, j’embrassai d’un dernier regard le toit hospitalier des mineurs, et cette vaste mer du Nord qui déroulait delà du petit goulet de Kaafiord ses plaines mobiles : en ce moment on entrevoyait au loin, à moitié perdu dans la brume, un petit navire courant sous toutes ses voiles