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VOYAGE D’UNE FEMME AU SPITZBERG.

encore vu dans ce genre. Il fallait gravir deux ou trois cents pieds de hauteur, presque à pic, le long du flanc roide d’une des montagnes ; cette ascension était favorisée par une épaisse couche de neige ; les pieds des premiers voyageurs formaient des espèces de marches à l’aide desquelles les autres s’élevaient sans trop de difficultés. Arrivé à quelque plateau, on s’asseyait sur la pente et on se laissait glisser jusqu’en bas, en se dirigeant tant bien que mal avec les mains, afin de ne pas perdre l’équilibre ; ainsi on redescendait en deux ou trois minutes ce qu’on avait mis souvent deux heures à gravir ; c’était singulièrement amusant, et, ce qui valait encore mieux, fort réchauffant. Mon adresse ne fut pas tout de suite à la hauteur de ma hardiesse ; les premières fois il m’arriva souvent de perdre l’équilibre et de rouler comme une masse, tantôt sur la tête, tantôt sur le côté, soulevant autour de moi des tourbillons de neige dans mes efforts pour me raccrocher, riant de bon cœur de ma maladresse et faisant rire les autres, du reste ne risquant jamais de me faire grand mal, la neige fraîche formant sur la pente comme une couche de mousse épaisse ; le seul désagrément de ce jeu d’écoliers était de déposer toujours une certaine quantité de neige entre le cou et la cravate. Mais on risquerait bien davantage pour trouver un exercice amusant à faire au Spitzberg.

Au pied des grandes montagnes de granit, la neige forme seule le sol à une assez grande profondeur ; si avec le bâton ferré on creuse cette couche de neige, on trouve au fond, non de la terre, mais de la glace ; en donnant quelques coups de bâton