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AU SPITZBERG.

d’étranges villes que Tromsoë et Hammerfest, et fort peu dignes de ce nom. Jugez-en : Tromsoë, c’est un port entouré de hangars de bois, et une rue, une seule rue, la Canebière de l’endroit, donnant d’un côté sur la mer et terminée à l’autre bout par un glacier ; un énorme glacier vert et bleu, très-complet, très-réel, très-capable de vous engloutir sous une avalanche, si vous aviez la curiosité d’aller l’observer de trop près. Cette rue à singulière perspective est montueuse et non pavée ; dès le dégel, le sol est entièrement défoncé, plein de trous remplis d’une boue noire et épaisse ; on a jeté au milieu du chemin quelques grosses pierres et de longues planches, à l’aide desquelles on arrive à n’avoir de fange que jusqu’aux chevilles. Les deux côtés de cette avenue difficile sont bordés de maisons de bois revêtues de la couche de peinture rouge ou grise, uniforme invariable des habitations du Finmark ; la plupart des maisons sont posées sur des piliers de bois et se tiennent en l’air comme sur des tables basses ; sage précaution contre les neiges de l’hiver, mais qui produit pour des yeux français l’effet le plus bizarre. Toutes ces maisons sont habitées par des marchands : ce sont beaucoup plutôt des magasins que des boutiques ; l’art d’appeler l’acheteur par les séductions de l’étalage est entièrement inconnu aux commerçants de Tromsoë ; il serait du reste peu utile ; il n’y a pas d’inattendu possible dans un pareil lieu, et des voyageurs tels que nous ne s’y voient peut-être pas tous les vingt ans. Quant aux voyageuses, j’eus l’honneur d’en donner le premier échantillon. Les boutiques sont