Page:Aunet - Voyage d’une femme au Spitzberg, 1872.pdf/121

Cette page a été validée par deux contributeurs.
109
AU SPITZBERG.

ture avait percée de part en part ; la longue galerie de cette espèce de tunnel est le refuge et le palais des oiseaux de mer, les seuls oiseaux qu’on voie dans ces parages ; les grandes mouettes blanches, si élégantes, les goëlands de toutes grosseurs, ces oiseaux à gros bec, à plumage gris et rouge, nommés vulgairement perroquets de mer, étaient là par bandes innombrables ; mais je vis surtout une prodigieuse quantité d’éders. L’éder est cette espèce de canard agile qui produit l’édredon. On ne tue pas l’oiseau pour se procurer son précieux duvet, lui-même l’arrache de dessous ses ailes pour en garnir son nid ; à l’époque de la ponte, on cherche les nids toujours cachés dans les creux des rochers au bord de la mer, et on en dérobe le duvet ; la courageuse bête se dépouille alors de nouveau afin de regarnir le nid où ses petits doivent éclore.

Près de la montagne percée, le bateau à vapeur fut accosté par une barque où gesticulait un petit homme fort impatient d’arriver à bord ; ce petit homme, bien vêtu de drap vert, ayant du beau linge blanc, et, contre la coutume norwégienne, les cheveux soigneusement arrangés, me fit l’effet d’un touriste assez élégant ; il était environné de plusieurs corbeilles fermées qu’on embarqua avec lui. À peine sur le pont, il ouvrit ses corbeilles ; elles étaient pleines de couteaux de différentes dimensions, cet élégant était un coutelier, dont le bateau à vapeur amenait la clientèle.

Ce coutelier a du reste une réputation dans tout le Finmark, et de très-loin on donne commission de lui faire des achats, ses produits sont excellents et, ce