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VOYAGE D’UNE FEMME AU SPITZBERG.

m’assis dans la boue en pleurant de rage. Heureusement mon cocher avait eu l’esprit de venir au-devant de moi par la grand’route avec du monde de la fonderie ; il me découvrit dans ma détresse ; on m’enveloppa d’un manteau ; je pris le bras d’un robuste paysan muni d’un long bâton ferré, et, après deux ou trois chutes moins dangereuses que les précédentes, je pus regagner la voiture. Inutile d’ajouter que je ne songeai pas à aller admirer l’autre cascade de Leerfoss, et que je donnai l’ordre de me ramener au plus vite à Drontheim. J’arrivai à l’hôtel à dix heures du soir, à moitié morte de fatigue et de froid. Les misères de cette journée ne se terminèrent pas là : je devais m’embarquer le lendemain pour Hammerfest ; en mon absence, mes caisses avaient été transportées à bord ; je n’avais plus rien à ma disposition pour me changer, pas de robe, pas de chaussure, rien absolument. Je dus, après m’être débarrassée, à force d’ablutions, de la couche de terre glaise qui faisait de moi une sorte de statue, me draper dans un drap de lit, me chausser de serviettes et passer la nuit à blanchir et à sécher mes vêtements. Je dois être entièrement inaccessible aux pleurésies, puisque je n’en ai pas gagné une cette fois-là.

Adieu, je repars encore ; vous n’aurez plus maintenant de mes nouvelles que datées du cap Nord.