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AU SPITZBERG.

veau ; je dus porter mon verre à mes lèvres une quarantaine de fois, et cela eût pu même avoir des inconvénients pour ma raison, si l’eau-de-vie des gaards ne m’avait heureusement aguerrie contre les spiritueux. À sept heures on sortit de table pour revenir dans le salon, et, avant de s’asseoir, chacun des invités alla donner une poignée de main à tous les autres, en l’accompagnant, suivant son sexe, d’une révérence ou d’un salut. Après, le bal commença, et lorsque je me retirai, vers dix heures et demie, je laissai toute la réunion valsant au grand jour, ce qui donnait à cette fête une physionomie tout à fait particulière.

Drontheim a son monument historique ; c’est la forteresse de Monkholm, autrefois prison d’État, aujourd’hui citadelle-arsenal. Monkholm est bâti sur une île de rochers située à une demi-lieue de la ville ; primitivement c’était un couvent, comme son nom l’indique (monk, moine, et holm, rocher). À Monkholm fut renfermé pendant sa longue captivité le Danois Schumacker, comte de Griffenfeld, rédacteur de la célèbre loi royale de 1660, qui changea la monarchie élective du Danemark en monarchie héréditaire. L’ordonnance commence par ces mots :

« Frédéric III, par la grâce de Dieu, roi de Danemark et de Norwége, des Vandales et des Goths, duc de Slesvig, de Holstein, de Stormaric, de Dytmarse, comte d’Oldenbourg et de Delmenhorst : savoir faisons, etc., etc. » Ces titres pompe ne précédaient que l’œuvre d’un ambitieux parvenu. En inspirant cette loi au faible Frédéric, Schumacker servait à la fois sa haine et ses projets d’élévation : il enlevait à