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VOYAGE D’UNE FEMME

difficile de les deviner. En furetant dans les rues, on demeure surpris d’apercevoir, au fond de pièces éclairées par de petits châssis garnis de verres troubles, des fourrures précieuses et de luxueuses étoffes, entassées pêle-mêle sur des rayons avec des jarretières de laine, de la filasse et des boutons d’os. Si on entre dans un de ces capharnaüms, on obtient difficilement de se faire montrer des marchandises. Le boutiquier norwégien ignore l’art de faire acheter, à peine consent-il à vendre ; il dédaigne les manières complaisantes qui sont de rigueur dans sa profession ; il fume magistralement dans un coin, et, lorsqu’on l’aborde, il prend un air rogue qui semble engager le passant à bien réfléchir avant de le déranger. Il faut vraiment avoir un besoin absolu d’un objet pour ne pas se retirer devant les mines rébarbatives de ces honnêtes citadins. Avec une pareille méthode on fait bien de ne pas entreprendre le commerce des choses de fantaisie ; car l’ennui d’acquérir dépassant le plaisir de posséder, il s’ensuivrait que l’acheteur s’abstiendrait.

Au milieu des baraques proprettes de Drontheim, on aperçoit un admirable monument : c’est la cathédrale, consacrée autrefois à saint Olaf ou Olaüs ; elle est là, haute, solide, inébranlable comme la pensée de Dieu au milieu des choses périssables. Sa construction première doit remonter au dixième siècle ; les transsepts des deux nefs sont à grandes arcades rondes soutenues et séparées par un pilier ; le chœur est du plus pur gothique : il fut terminé, je crois, à la fin du douzième siècle, par le savant archevêque Eystein.