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LES NUITS ATTIQUES, LIVRE IV


goût. » Pour cette réponse déplacée, le censeur relégua le plaisant dans la classe des citoyens privés du droit de suffrage, et motiva son arrêt sur une plaisanterie inconvenante faite en sa présence. Il n'y a pas moins de sévérité dans cet autre fait. Les censeurs délibérèrent un jour sur la punition qui devait être infligée à un citoyen qui, appelé en témoignage par un ami, s'était permis, en pleine séance, de bâiller de toutes ses forces et avec grand bruit ; ils allaient condamner le coupable pour s'être laissé aller à un acte qui dénotait une étourderie indécente et un sans-gène fort insolent ; mais celui-ci assura par serment qu'il n'avait pu se retenir, que ce bâillement lui avait échappé, et qu'il était sujet à la maladie appelée oscedo, envie continuelle de bâiller ; alors l'arrêt, porté contre lui déjà, fut annulé. P. Scipion l'Africain, fils de P. Emile, consigne ces deux faits dans le discours qu'il prononça, pendant sa censure, pour rappeler le peuple à la sévérité des mœurs des anciens Romains. Le troisième fait est tiré du septième livre des Mémoires de Sabinus Massurius : « Les censeurs P. Scipion Nasica et M. Popillius, dit-il, passant la revue des chevaliers, en remarquèrent un dont le cheval était maigre et en mauvais état, tandis qu'il était lui-même gras et brillant de santé. « D'où vient, disent ces magistrats, que tu es en meilleur état que ton cheval ? — C'est que je me soigne moi-