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AULU-GELLE

C'est ce passage que Salluste a voulu imiter, lorsqu'il dit dans son Histoire, en parlant de Sertorius : « Sertorius se couvrit de gloire en Espagne, où il servit, en qualité de tribun militaire, sous les ordres du général T. Didius ; il rendit des services signalés dans la guerre des Marses, en levant des troupes et en les armant ; pendant son commandement, il sut se distinguer par des exploits que l'obscurité de sa naissance et la jalousie des écrivains ont laissés dans l'oubli, mais dont il portait les marques sur son visage : il avait un œil crevé, ses joues étaient couvertes de cicatrices ; mais il tirait un noble orgueil de ses blessures, et, loin de s'en affliger, la gloire embellissait ce qu'il avait conservé. »

T. Castricius disait en comparant ces deux portraits : N'est- il point contre nature de se réjouir de la mutilation de son corps ? car la joie n'est autre chose que l'expansion de l'âme, causée par l'accomplissement des vœux les plus ardents. Combien Démosthène est plus près de la nature et plus logique ! « Philippe abandonnait sans regret à la fortune tout ce qu'elle voudrait lui prendre. » Dans ce passage, Philippe ne se réjouit pas, comme Sertorius, de la mutilation de son corps, ce qui est invraisemblable et outré; mais le soin de sa gloire et de sa renommée lui font compter pour rien les mutilations, la perte de ses membres ;