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LE RAMEAU D’OR

couronnes que votre vertu, votre naissance et votre fidélité méritent ; vos travaux vont se changer en plaisirs. Princesse Brillante, continua-t-elle, ce berger si terrible à votre cœur, est le prince qui vous fut destiné par votre père et par le sien. Il n’est point mort dans la tour. Recevez-le pour époux, et me laissez le soin de votre repos et de votre bonheur. La princesse, ravie, se jeta au cou de Bénigne ; et lui laissant voir les larmes qui coulaient de ses yeux, elle connut par son silence que l’excès de sa joie lui ôtait l’usage de la parole. Sans-Pair s’était mis aux genoux de cette généreuse fée ; il baisait respectueusement ses mains, et disait mille choses sans ordre et sans suite. Trasimène lui faisait de grandes caresses, et Bénigne leur conta, en peu de mots, qu’elle ne les avait presque point quittés ; que c’était elle qui avait proposé à Brillante de souffler dans le manchon jaune et blanc ; qu’elle avait pris la figure d’une vieille bergère pour loger la princesse chez elle ; que c’était encore elle qui avait enseigné au prince de quel côté il fallait suivre sa bergère. Á la vérité, continua-t-elle, vous avez eu des peines que je vous aurais évitées, si j’en avais été la maîtresse ; mais enfin, les plaisirs d’amour veulent être achetés.

L’on entendit aussitôt une douce symphonie qui retentit de tous côtés ; les amours se hâtèrent de couronner les jeunes amants ; l’hymen se fit ; et pendant cette cérémonie, les deux princesses qui venaient de quitter la figure de souris, conjurèrent la fée d’user de son pouvoir, pour délivrer du château de l’enchanteur les souris et les chats infortunés qui s’y désespéraient. Ce jour-ci est trop célè-