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LA PRINCESSE ROSETTE.

et que j’aie de bons rôts. Le soir étant venu, la princesse dit à Frétillon : Va-t’en à la ville, entre dans la meilleure cuisine, et m’apporte de bons rôts. Frétillon fit comme sa maîtresse lui avait commandé ; et ne sachant point de meilleure cuisine que celle du roi, il y entra tout doucement, pendant que les cuisiniers avaient le dos tourné ; il prit tout le rôt qui était à la broche, d’une mine excellente, et à voir seulement, faisait appétit. Il rapporta son panier plein à la princesse ; elle le renvoya aussitôt à l’office, et il apporta toutes les compotes et toutes les dragées du roi.

Le roi, qui n’avait pas dîné, ayant grand faim, voulut souper de bonne heure, mais il n’y avait rien ; il se mit dans une colère effroyable, et s’alla coucher sans souper. Le lendemain au dîner et au souper, il en arriva tout autant ; de sorte que le roi resta trois jours sans boire ni manger, parce que, quand il allait se mettre à table, l’on trouvait que tout était pris. Son confident, fort en peine, craignant la mort du roi, se cacha dans un petit coin de la cuisine, et il avait toujours les yeux sur le pot qui bouillait. Il fut bien étonné de voir entrer tout doucement un petit chien vert, qui n’avait qu’une oreille, qui découvrait le pot, et mettait la viande dans son panier. Il le suivit, pour savoir où il irait ; il le vit sortir de la ville. Le suivant toujours, il fut chez le bon vieillard. Il revint en diligence tout conter au roi.

Le roi demeura bien étonné : il dit qu’on l’allât querir. Le confident, pour faire sa cour, y voulut aller lui-même, et mena des archers ; ils le trouvèrent qui dînait avec la princesse, et qu’ils mangeaient le bouilli du roi. Il les fit