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qu’elle avait souffert, pensa mourir de douleur quand elle aperçut ces trois chiennes de bêtes et qu’elle vit cette doguinerie sur son lit, qui faisaient un bruit désespéré ; elle se mit à pleurer amèrement, puis joignant ses mains : « Hélas ! madame, dit-elle, n’ajoutez point des reproches à mon affliction, elle ne peut assurément être plus grande ; si les dieux avaient permis ma mort avant que j’eusse reçu l’affront de me voir mère de ces petits monstres, je me serais estimée trop heureuse : hélas ! que ferai-je ? Le roi me va haïr autant qu’il m’a aimée. » Les soupirs et les sanglots étouffèrent sa voix, elle n’eut plus de force pour parler ; et la reine mère continuant à lui dire des injures, eut le plaisir de passer ainsi trois heures au chevet de son lit.

Elle s’en alla ensuite, et sa sueur qui feignait de partager ses déplaisirs lui dit qu’elle n’était pas la première à qui semblable malheur était arrivé : qu’on voyait bien que c’était là un tour de cette vieille fée qui leur avait promis tant de merveilles ; mais que comme il serait peut-être dangereux pour elle de voir le roi, elle lui conseillait de s’en aller chez leur pauvre mère avec ses trois enfants de chiens. La reine ne lui répondit que par ses larmes. Il fallait avoir le cœur bien dur pour n’être pas touchée de l’état où elles la réduisaient, elle donna à téter à ces vilains chiens, croyant en être la mère.

La reine mère commanda à Feintise de prendre les enfants