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LA BICHE

de toutes sortes de bonnes qualités ; vous n’aurez qu’à prendre le bouquet que nous vous donnons et nommer chaque fleur en pensant à nous ; soyez certaine qu’aussitôt nous serons dans votre chambre. »

La reine, transportée de joie, se jeta à leur cou et les embrassades durèrent plus d’une grosse demi-heure. Après cela elles prièrent la reine d’entrer dans leur palais, dont on ne peut faire une assez belle description ; elles avaient pris pour le bâtir l’architecte du soleil : il avait fait en petit ce que celui du soleil est en grand. La reine, qui n’en soutenait l’éclat qu’avec peine, fermait à tous momens les yeux. Elles la conduisirent dans leur jardin ; il n’a jamais été de si beaux fruits ; les abricots étaient plus gros que la tête, et l’on ne pouvait manger une cerise sans la couper en quatre, d’un goût si exquis qu’après que la reine en eut mangé, elle ne voulut de sa vie en manger d’autres.

De dire tous les transports de la reine, combien elle parla de la petite princesse Désirée, combien elle remercia les aimables personnes qui lui annonçaient une si agréable nouvelle, c’est ce que je n’entreprendrai point ; mais enfin il n’y eut aucuns termes de tendresse et de reconnaissance oubliés. La fée de la fontaine y trouva toute la part qu’elle méritait ; la reine demeura jusqu’au soir dans le palais ; elle aimait la musique, on lui fit entendre des voix qui lui parurent célestes, on la chargea de présens, et après avoir remercié ces grandes dames, elle revint avec la fée de la fontaine.