prochaine liberté de la princesse ; et elle fut augmentée par la nouvelle que le roi Merlin voulait l’avoir pour son fils, et qu’il envoyait son ambassadeur Fanfarinet pour en faire la demande.
La nourrice qui disait tout à la princesse, lui conta ceci, et qu’il n’y aurait rien au monde de si beau que l’entrée de Fanfarinet. « Ah ! que suis infortunée, s’écria-t-elle, on me retient dans une sombre tour, comme si j’avais commis quelque grand crime ; je n’ai jamais vu le ciel, le soleil et les étoiles dont on dit tant de merveilles ; je n’ai jamais vu un cheval, un singe, un lion, si ce n’est en peinture. Le roi et la reine disent qu’ils me retireront d’ici quand j’aurai vingt ans ; mais ils veulent m’amuser pour me faire prendre patience, et je sais fort bien qu’ils m’y veulent laisser périr sans que je les aie offensés en rien. » Là-dessus elle se prit à pleurer si fort qu’elle en avait les yeux gros comme le poing, et la nourrice, et la sœur de lait, et la remueuse, et la berceuse, qui l’aimaient toutes passionnément, se mirent aussi tant à pleurer qu’on n’entendait que des sanglots et des soupirs ; elles pensèrent en étouffer : c’était une grande désolation.
Quand la princesse les vit en si bon train de s’affliger, elle prit un couteau, et dit tout haut : « Je suis résolue de me tuer tout à l’heure, si vous ne trouvez le moyen de me faire voir la belle entrée de Fanfarinet ; jamais le roi ni la reine ne le sauront : avisez ensemble si vous aimez mieux que je m’égorge dans cette place,