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LE PRINCE

les siens ; son pouvoir sur l’esprit de la reine le faisait craindre. On lui conta ce que les dames disaient : il se mit dans une colère qui allait jusqu’à la fureur. Il entra ainsi dans la chambre de la reine, et lui dit qu’il allait se tuer à ses yeux, si elle ne trouvait le moyen de faire périr Léandre. La reine qui le haïssait, parce qu’il était plus beau que son singe de fils, répliqua qu’il y avait long-temps qu’elle le regardait comme un traître ; qu’elle donnerait volontiers les mains à sa mort ; qu’il fallait qu’il allât avec ses plus confidens à la chasse ; que Léandre у viendrait, et qu’on lui apprendrait bien à se faire aimer de tout le monde.

Furibon fut donc à la chasse. Quand Léandre entendit des chiens et des cors dans ses bois, il monta à cheval et vint voir qui c’était. Il demeura fort surpris de la rencontre inopinée du prince ; il mit pied à terre et le salua respectueusement : il le reçut mieux qu’il ne l’espérait, et lui dit de le suivre. Aussitôt il se détourna, faisant signe aux assassins de ne pas manquer leur coup. Il s’éloignait fort vite, lorsqu’un lion d’une grandeur prodigieuse sortit du fond de sa caverne, et se lançant sur lui, le jeta par terre. Ceux qui l’accompagnaient prirent la fuite : Léandre resta seul à combattre ce furieux animal. Il fut à lui l’épée à la main ; il hasarda d’en être dévoré, et par sa valeur et son adresse il sauva son plus cruel ennemi. Furibon s’était évanoui de peur, Léandre le secourut avec des soins merveilleux. Lorsqu’il fut un peu revenu, il