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L’IDÉE RÉPUBLICAINE ET DÉMOCRATIQUE

Cependant il y eut un fort courant d’opinion contre elles :

1o Parce qu’on débuta par leur faire voter une augmentation d’impôts (une, celle de Touraine, s’y refusa nettement ; d’autres obtinrent un abonnement et une réduction) ;

2o Parce que les Parlements les décrièrent.

D’abord, ils hésitèrent ou se refusèrent à enregistrer les édits.

Puis ils empêchèrent en fait plusieurs Assemblées provinciales de se réunir : celle de Basse-Guyenne, celle d’Aunis et de Saintonge, celle de Franche-Comté. L’Assemblée provinciale du Dauphiné ne put siéger que quelques jours.

La tactique des Parlements fut de présenter les anciens États provinciaux comme préférables à des assemblées que le roi semblait nommer, comme plus indépendants, comme plus capables de diminuer les charges ou d’en empêcher l’augmentation.

Si bien que ces vieux États provinciaux aristocratiques, naguère impopulaires, furent redemandés de toutes parts.

La royauté subit un terrible échec.

Elle céda au Parlement de Besançon et réunit les États de Franche-Comté (novembre 1788).

Elle céda au Parlement de Grenoble, ou plutôt il y eut en Dauphiné une véritable insurrection, une réunion spontanée et révolutionnaire des trois ordres de la province à Vizille (juillet 1788), où le tiers état se trouvait en majorité, où furent proclamés les droits des hommes et ceux de la nation, en même temps qu’on réclamait les anciens États, mais réformés, moins aristocratiques. Le roi les accorda par l’arrêt du Conseil du 22 octobre 1788.

Cette nouvelle émut tous les Français.

Partout on réclama des États provinciaux comme ceux du Dauphiné.

Dans les cahiers de 1789, c’est un vœu général, même dans les cahiers de ce bailliage du Berry où on jouissait depuis dix ans d’une Assemblée provinciale type et modèle[1].

Donc les libertés octroyées par le roi étaient dédaigneusement repoussées, sous l’influence des Parlements. On demandait des États provinciaux, et ainsi, sans le vouloir et sans le savoir, on tendait à une fédération des provinces, constituées en autant de républiques, qui auraient envoyé des représentants à des États généraux.

On voit qu’en 1789 la royauté est impuissante, soit à obtenir l’argent dont elle a besoin pour vivre, soit même à faire accepter les bienfaits

    rétrograde pendant la Révolution) à l’Assemblée provinciale de Picardie (ap. Léonce de Lavergne, p. 132), et le début, ainsi que la conclusion, du rapport des procureurs-syndics de Champagne, session de novembre et décembre 1787. Bibl. nat., Lk 16/21, in-4, p. 22 et 65.

  1. Le cahier du Tiers état du bailliage du Berry demande qu’il soit « établi des états provinciaux en Berry, organisés de la même manière que ceux nouvellement établis dans la province du Dauphiné ». (Arch. parl., t. II, p. 324.) La noblesse exprime le même vœu. (Ibid. p. 319.)