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dont la culpabilité était évidente ? Pourquoi vous tuer vous-même, quand vous êtes convaincu de votre innocence ? Pour nous, nous n’absolvons pas le coupable, mais nous désirons d’abord le convertir, afin qu’ensuite il mérite d’être absous ; mais soit que vous vous épargniez, soit que vous vous ôtiez la vie, tant que vous resterez Donatiste, nous ne pourrons vous regarder comme innocent. Libre à vous de vous attribuer toute l’innocence possible, mais du moment que vous vous suicidez innocent, vous cessez de l’être à nos yeux. Mais, me direz-vous peut-être, quand je me tue, je ne tue point un innocent, puisque je deviens coupable par le fait seul que je forme la résolution de m’ôter la vie ; avant de tuer le corps, je suis déjà coupable dans mon âme. Si c’est là ce que vous dites, vous êtes parfaitement dans la vérité, et en vous accusant, vous vous défendez d’une manière étrange. Vous prouvez que-la résolution même de vous tuer, vous constitue coupable ; il est évident dès lors qu’après la perpétration du crime, il sera impossible de vous prouver que vous avez tué un innocent. Il suit de là qu’un innocent peut être tué par une main étrangère, tandis que celui qui se tue n’est jamais innocent, puisque la volonté seule de se suicider a suffi pour le rendre criminel. C’est ce qui aurait lieu pour vous, si, avant d’avoir prémédité votre mort, vous eussiez été innocent ; mais il n’en était point ainsi, car votre hérésie est d’abord pour vous un crime ; votre suicide ne sera donc pas pour vous le principe de votre iniquité, il ne fera qu’y mettre le dernier sceau.

XV. Texte de la lettre : « Quant à saint Émérite de Césarée, ce que vous en avez appris est le résultat d’une fausse renommée. Tout cela fût-il vrai, je redirais alors cette parole de l’Apôtre : Lors même que quelques-uns d’entre eux auraient abandonné la foi, est-ce que leur infidélité a détruit la foi divine ? Assurément non[1] ». Réponse : Je crois devoir raconter d’Émérite de Césarée, ce que vous n’avez osé dire. C’est à tort que le bruit a couru qu’il s’est fait catholique rien de plus facile que de vous donner connaissance de tout ce qui s’est passé. Pourquoi donc voudriez-vous taire les éloges que mérite votre co-évêque, dont le nom vous est proposé comme modèle ? Si dans un moment aussi solennel, sa conduite a mérité quelques louanges, vous convient-il de les ensevelir dans le silence de l’oubli ? Vous ne voulez pas que nous disions que vous avez été jaloux des éloges qu’il a pu mériter ; quel motif aviez-vous donc de les passer sous silence, si ce n’est parce que vous avez craint d’avoir à rougir de sa conduite ? Emérite se rendit donc à l’église où nous étions tous réunis. Il y vint pour le seul plaisir de nous voir et sans qu’il ait eu à subir aucune violence ni de persuasion ni de coaction. Après nous être rencontrés, nous entrâmes ensemble dans une église catholique, une foule immense s’y rendit également. Mais il ne put rien dire ni pour sa propre justification ni pour la vôtre, et cependant il refusa d’entrer dans l’unité ; quoique fortement ébranlé il tint bon dans son erreur, quoique convaincu il garda le silence, quoique vaincu il se retira sain et sauf. Se pouvait-il une circonstance qui prouvât mieux notre douceur, qui rendît plus invincible la vérité catholique, qui fût plus propre à procurer votre conversion, si vous vouliez y réfléchir sérieusement ? Il est évident qu’en se rendant de lui-même au milieu de nous, il se proposait de parler en votre faveur, et par là même contre nous ; si donc il a gardé le silence, c’est qu’il n’a rien trouvé à dire. Il avait certainement préparé ce qu’il devait dire, mais dans son infinie miséricorde, Dieu permit que la réfutation la plus péremptoire précédât les plus insidieuses objections. Direz-vous qu’il pouvait répondre, mais qu’il ne le voulut pas ; alors lisez ce quia été dit en sa présence et répondez vous-même. Si Emérite eût embrassé le parti catholique, seul principe de la paix, vous diriez qu’il a été vaincu, non pas par l’évidence de la vérité, mais par le poids accablant d’une persécution à laquelle il n’a pu résister. Si on l’eût amené chargé de chaînes à l’assemblée, vous diriez que s’il s’est tu, ce n’est pas qu’il n’eût rien à répondre, mais parce qu’il cherchait un moyen de recouvrer sa liberté. Si donc il s’est présenté de lui-même et en toute liberté, avouez que s’il lui a manqué quelque chose pour répondre, ce n’a pas été la langue, mais la possibilité de soutenir une cause aussi défectueuse ; d’un autre côté, s’il a refusé d’entrer dans la communion de l’Église catholique, c’est que la confusion qu’il a ressentie, en blessant son orgueil, n’a fait que rendre son obstination

  1. Rom. 3,3