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LA CITÉ DE DIEU.

nous respirons, ainsi Dieu, qui est tout-puissant, a pu très-bien aussi en former un, non de sa nature, ni d’aucune chose créée, mais du néant, et le mettre dans le corps de l’homme. D’ailleurs, afin que ces habiles personnes qui se mêlent de parler de l’Ecriture et n’en étudient pas le langage, apprennent qu’elle ne fait pas sortir de la bouche de Dieu seulement ce qui est de même nature que lui, qu’elles écoutent ce que Dieu y dit : « Tu es tiède, tu n’es ni froid ni chaud ; c’est pourquoi je vais te vomir de ma bouche ».

Il ne faut donc plus résister aux paroles expresses de l’Apôtre, lorsque distinguant le corps animal du corps spirituel, c’est-à-dire celui que nous avons maintenant de celui que nous aurons un jour, il dit : « Le corps est semé animal, et il ressuscitera spirituel. Comme il y a un corps animal, il y a aussi un corps spirituel, ainsi qu’il est écrit : Adam, le premier homme, a été créé avec une âme vivante, et le second Adam a été rempli d’un esprit vivifiant. Mais ce n’est pas le corps spirituel qui a été formé le premier, c’est le corps animal, et ensuite le spirituel. Le premier homme est le terrestre formé de la terre, et le second homme est le céleste descendu du ciel. Comme le premier homme a été terrestre, ses enfants sont aussi terrestres ; et comme le second homme est céleste, ses enfants sont aussi célestes. De la même manière donc que nous avons porté l’image de l’homme terrestre, portons aussi l’image de l’homme céleste ». Ainsi le corps animal, dans lequel l’Apôtre dit que fut créé le premier homme, n’était pas composé de telle façon qu’il ne pût mourir, mais de telle façon qu’il ne fût point mort si l’homme n’eût péché. Le corps qui sera spirituel, parce que l’Esprit le vivifiera, ne pourra mourir, non plus que l’âme, qui, bien qu’elle meure en quelque façon en se séparant de Dieu, conserve néanmoins toujours une vie qui lui est propre. Il en est de même des mauvais anges qui, pour être séparés de Dieu, ne laissent pas de vivre et de sentir, parce qu’ils ont été créés immortels, tellement que la seconde mort même où ils seront précipités après le dernier jugement ne leur ôtera pas la vie, puisqu’elle leur fera souffrir de cruelles douleurs. Mais les hommes qui appartiennent à la grâce et qui seront associés aux saints anges dans la béatitude seront revêtus de corps spirituels, de manière à ce qu’ils ne pécheront ni ne mourront plus.

Reste une question qui doit être discutée et, avec l’aide de Dieu, résolue, c’est de savoir comment les premiers hommes auraient pu engendrer des enfants s’ils n’eussent point péché, puisque nous disons que les mouvements de la concupiscence sont des suites du péché. Mais il faut finir ce livre, et d’ailleurs la question demande à être traitée avec quelque étendue ; il vaut donc mieux la remettre au livre suivant.