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QUARANTE-QUATRIÈME SERMON.
POUR L’ÉPIPHANIE DU SEIGNEUR. 10

ANALYSE. —1. Les Mages viennent sous la conduite de l’étoile. —2. Comparaison entre eux et la reine de Saba, qui est allée visiter Salomon. —3 Extravagances d’Hérode. —4. Nous devons joyeusement accourir aux pieds du Christ avec les Mages.

1. Le jour solennel de la sainte Épiphanie vient de se lever sur l’univers : le monde entier doit donc le célébrer, car un astre a dissipé, par l’éclat de ses rayons, les ténèbres où il était plongé, une étoile nouvelle a brillé aux yeux des hommes. Sous la conduite de cette étoile, les Mages sont venus d’Orient à Jérusalem ; par le fait d’une révélation d’en haut, ils ont reconnu dans l’enfant celui dont ils attendaient leur salut, et ils l’ont adoré. Rien, pourtant, dans le Christ nouveau-né, ne prêtait à l’adulation : il n’était point assis sur un trône royal, il ne portait point de manteau de pourpre, sur son front ne brillait point de diadème, autour de lui, nul apparat de domestiques, point de gardes pour inspirer la crainte. Ce n’était pas non plus la gloire acquise en d’heureux combats qui avait pu attirer les Mages auprès du Christ ; s’ils ont suivi l’étoile, ç’a été uniquement sous l’influence d’un sentiment de religion et de piété. Et parce qu’un Sauveur était né pour les nations, ils lui ont apporté, des extrémités de la terre, trois sortes de présents, emblèmes magnifiques de la Trinité. Un enfant, nouvellement né, était couché dans une crèche, son corps était tout petit, sa pauvreté le rendait méprisable ; mais sous ces minces apparences se cachait quelque chose de grand ; et cet enfant, les Mages avaient appris à le connaître, non sur un signe venu de la terre, mais d’après le langage muet du ciel ; c’est pourquoi ils venaient de si loin pour lui offrir leurs hommages et le prier.

2. Une reine du Midi était venue des confins du monde ; elle voulait recevoir, de la bouche de Salomon, des leçons de sagesse. Ce n’était pas la gloire de son règne qu’elle désirait connaître, c’était la lumière de l’esprit, le radieux éclat de la sagesse, qu’elle souhaitait de contempler. La sagesse qui brillait en Salomon était si grande, que le bruit s’en était répandu à d’énormes distances, et que les esprits studieux s’étaient sentis enflammés du désir d’apprendre ; par conséquent, cette femme était venue à la recherche, non point d’un Dieu caché, mais d’un homme qui lui parlerait ; elle était venue, non pour adorer, mais pour écouter. Qui avait donné à Salomon cette admirable connaissance de toutes choses ? C’était le Christ, notre Seigneur et Sauveur, celui qui, revêtu de l’infirmité de notre chair, se cachait encore ici-bas sous les dehors d’un petit enfant, mais qui faisait déjà briller, dans le ciel, le signe radieux de son infinie majesté.

3. Le bruit de sa naissance se répand dans le ciel, parmi les étoiles, au milieu des anges ; il s’étend jusqu’aux bergers, aux scribes, aux pharisiens, aux nations, aux Mages ; et, par toutes ces routes à la fois, il arrive aux oreilles du roi Hérode. Celui-ci l’entend, l’épouvante le saisit. Hérode, que crains-tu ? Pourquoi ton âme méchante se trouble-t-elle ? Si tu veux arriver au salut, celui-là est né, qui pourra te mettre en possession du royaume de Dieu, mais qui ne saurait t’inspirer aucune jalousie parce qu’il n’est point un roi de la terre. Pourquoi te montrer cruel ? A quoi bon massacrer des enfants ? Pourquoi faire du mal à un âge qui n’en fait pas ? Le glaive de ce Roi qui vient de naître ne sera jamais l’instrument de la méchanceté