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QUARANTE-DEUXIÈME SERMON.
POUR L’ÉPIPHANIE DU SEIGNEUR. 8

ANALYSE. —1. Le Christ se fait connaître aux Mages par l’entremise de l’étoile. —2. Les mages l’adorent et lui offrent des présents mystiques. —3. Cruauté d’Hérode ; il fait massacrer les petits enfants. —4. Épilogue.

1. Frères bien-aimés, portez vos regards sur l’astre nouveau ; c’est le signe, non pas de la fatalité, mais de la royauté. Voyez-le briller dans sa course rapide, conduire les Mages au berceau du Christ, et, du haut du ciel, témoin de son obéissance, appeler à la crèche le monde entier. Comme, après la nuit, le pôle nous apparaît sous les teintes brillantes de l’aurore, ainsi les premiers rayons de la lumière se montrent au genre humain assis dans les ténèbres et les ombres de la mort ; ainsi s’annonce le Fils de Dieu, jusqu’alors inconnu. Voici venir les Mages, ces esclaves de l’astrologie, ces admirateurs des étoiles. Un globe de feu, qu’ils n’ont pas encore vu, projette dans les cieux d’éclatants rayons ; d’un pas rapide, il trace devant eux un chemin enflammé ; ils le suivent et voient bientôt, enfermé dans l’étroite enveloppe d’un maillot, celui dont l’étoile lumineuse annonçait tout à l’heure, du haut des airs, la glorieuse puissance. Jamais torche ardente ne répandit autour d’elle une lueur semblable à celle de cet astre ; jamais l’aurore n’envoya à la terre de rayons plus nombreux et plus doux ; jamais d’une fournaise nouvellement allumée ne s’échappèrent de pareils torrents de flammes : il brillait si vivement, que, à la vue de cette lumière sans précédente, la terre se trouvait saisie d’épouvante. Comment ne pas reconnaître la majesté suprême en celui dont la grandeur se lisait dans l’écrin céleste ?

2. Les Mages, au cœur desquels naissait la foi, prélude de la nôtre, s’approchent donc du Christ ; ils lui offrent de l’or, lui donnent de l’encens, lui apportent de la myrrhe. Pauvre petit enfant, vous êtes devenu bientôt riche ! Au milieu de tous ces présents, il pleure ; et bien qu’il gémisse, on le redoute comme un Dieu : Ses clients lui apportent des cadeaux ; ils courbent devant lui leurs fronts et l’adorent. On lui offre de l’or, parce qu’on reconnaît en lui un grand Roi ; on lui sacrifie de l’encens, en témoignage de sa divinité ; on lui donne de la myrrhe, comme à la victime qui doit mourir pour le salut de tous.

3. Mais, à force de craindre, l’impie Hérode devient cruel ; il sévit avec d’autant plus de rage qu’il veut cacher mieux sa honte. Dès le premier abord, il feint de vouloir adorer celui dont la naissance le remplit d’épouvante. À mon avis, mes frères, si cet ennemi intime du Christ ne fait pas de mal aux Mages, c’est qu’il n’est pas assez fort ; s’il joue le rôle d’innocent, c’est qu’il ne peut donner libre cours à sa méchanceté. Plein d’anxiété au sujet de ce successeur, tourmenté par la crainte de perdre sa royauté, Hérode se couvre du masque de suppliant, tout en nourrissant dans son âme des sentiments hostiles. Mais pouvait-il prendre au piège celui qui était venu détruire toutes les malices de la duplicité ? Il temporisa donc, il attendit, mais inutilement : trompé dans ses espérances, il n’eut pas la patience de tenir plus longtemps cachées les secrètes pensées de son cœur. Aussi donna-t-il l’ordre de massacrer les innocents, de faire tomber sous le glaive et sous les pierres des membres non encore affermis et nouvellement sortis des entrailles maternelles. O cruel attentat ! O rage inouïe de ce monde ! Ce massacre était de telle nature,