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SIXIÈME SERMON. SUR PLUSIEURS MARTYRS[1].

Ce sermon, qui porte le nom de saint Augustin et qui est parsemé des produits de son esprit, est tiré du catalogue num. 12, intitulé : « Sermons de saint Augustin, et d’autres ». On n’en voit aucune mention dans toutes les bibliothèques éditées que j’ai pu parcourir. Dans l’édition de Saint-Maur, on peut le placer après le sermon CCCXXVI. L’exorde et la pensée qui l’animent se trouvent dans le sermon CCLXXXVI, et à peu près dans les mêmes termes. Voyez aussi sermon CCCXXVIII, latin. 2, vers le milieu.

ANALYSE. – L’iniquité, en condamnant les martyrs, se mentait à elle-même. – L’amour de la vie éternelle triomphe de notre amour pour la vie du temps. – Comment le laboureur jette et sème son froment pour récolter du froment.

Martyrs est un mot grec que l’on traduit en latin par testes, ou témoins. Si donc les martyrs sont des témoins, c’est qu’ils ont subi tant de douleurs, pour affirmer la vérité de leur témoignage. La vérité servait Dieu, l’iniquité se mentait à elle-même. Car voici ce qui est écrit ; c’est le corps du Christ ou l’Église qui dit dans un psaume : « Des témoins iniques se sont élevés contre moi, et l’iniquité s’est démentie elle-même ». Il

  1. Bien que l’inscription porte indistinctement : « De plusieurs martyrs », on voit cependant que ces martyrs sont déterminés, par la lecture des actes qui a précédé et dont il est ainsi fait mention : « Quand on lisait la passion des saints. » Il est à penser que saint Augustin parlait alors des martyrs de Carthage, dont il fait mention dans le Brevicul. Collat. Diei 3, c. 17, où l’on trouve : « Ils avouaient dans leurs tourments qu’ils avaient fait une collecte et sanctifié le jour du Seigneur ». Ils étaient au nombre de quarante-huit, au dire de saint Optat de Milève, de Baluze, de Ruinart, et subirent le martyre la veille des ides de février, l’an 304. Et, à la vérité, ces collectes leur furent reprochées par le juge comme le seul point de culpabilité, et les martyrs avouent qu’ils les ont faites et en bénissent Dieu. Il serait difficile de croire que saint Augustin n’eût aucun sermon au sujet de ces martyrs si célèbres dans toute l’Afrique, lorsque le calendrier de Carthage accuse cinq solennités distinctes en leur honneur, et que l’on en fit une sixième, quand l’empereur Justinien eut bâti, dans son propre palais, un temple à la vierge Prima, comme le rapporte Procope (De aedif. a Just. Extruct. 6). Baronius met cette vierge célèbre au nombre de ces martyrs. Or, dans les éditions qui ont paru jusqu’alors, on regrettait qu’il n’y eût, au sujet de ces martyrs, aucun sermon, et toutefois, deux catalogues du Mont-Cassin, 12 et 17, contenant celui-ci, probablement prêché à Carthage, où la solennité de leur fête amena saint Augustin qui voulut d’une manière toute particulière réprimer chez les fidèles cette joie trop profane qui dégénérait en ivresse et en festins. Car il termine ainsi : a Célébrons les fêtes des martyrs par des honneurs à leur passion, et non par l’amour de la boisson. Ce sont à peu près les mêmes paroles qui terminent son avertissement à la fête de saint Cyprien, à Carthage, et à la fête des vingt martyrs d’Hippone. Dès qu’il en est ainsi, il faut accuser de fausseté cet auteur donatiste qui, chez saint Optat et chez Baluze (tom. 1 Miscell, p. 14, édit. 1761), rapporte dans ses additions qu’ils moururent de faim quand ils étaient encore en prison, puisque le juge fit trancher la tête à quelques-uns. Baronius et Ruinart avaient déjà répété ces additions, n’approuvant point l’histoire de Mensurius et de Cécilien. Si donc l’auteur donatiste est en défaut sur un point, il peut l’être sur d’autres. Les catalogues de Colbert, de Compiègne, et de (Pratel ?), dont s’est servi Ruinart, n’ont pas ces additions et précisent des jours et des lieux différents où eus martyrs ont versé leur sang. Ce titre nous fait comprendre pourquoi on célébrait leurs fêtes à part et en des jours différents à Carthage. C’est donc su catalogue du Mont-Cassin que revient l’honneur de rappeler, selon la vérité, l’histoire de ces martyrs ; ce qui les rend dignes de foi.