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des cieux[1] ». Et dès lors, quand il nous faut les gagner à la vie, on choisit de périr avec elles, et c’est là le fait des chrétiens ! je n’oserais dire des fidèles. Un catéchumène se méprisant lui-même, nous dira : Je ne suis qu’un catéchumène. Comment, tu es catéchumène ? Oui, catéchumène. Autre est donc ton front marqué du signe du Christ, et autre ton front pour aller au théâtre ? Tu veux y aller ? Change ton front, et va ensuite. Mais ce front que tu ne saurais changer, garde-toi de le perdre. Le nom du Seigneur est invoqué sur toi, le nom du Christ est invoqué sur toi, Dieu est invoqué sur toi, le signe de la croix du Christ a été marqué, peint sur ton front. C’est vous tous que j’exhorte, mes frères, à vous tous que je m’adresse. Vous verrez combien le nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ sera bien plus glorieux pour vous.

9. Oserai-je vous dire : Imitez la ville qui vous avoisine ? Imitez la ville de Simittu[2] qui est proche ? Je n’en dis pas davantage. Ou plutôt parlons plus clairement au nom du Seigneur Jésus. Là nul n’entre au théâtre nul libertin n’est resté là. Un légat voulut y rétablir ces obscénités ; nul homme de la haute ni de la basse classe n’y mit le pied ; pas un juif n’y entra. N’y a-t-il pas là des habitants honorables ? n’y a-t-il pas là une cité ? Cette colonie n’est-elle pas d’autant plus honorable qu’il y a moins de ces obscénités ? Je ne vous tiendrais pas ce langage, si j’entendais dire de vous le même bien. Mais je crains que mon silence n’attire sur moi une semblable condamnation. Dieu donc a voulu, mes frères, que je vinsse à passer par ici. Mon frère m’a retenu[3], m’a commandé, m’a supplié, m’a forcé de vous prêcher. Que dire, sinon ce que je redoute le plus ? Que dire, sinon ce qui m’est le plus douloureux ? Ne savez-vous point que moi, que nous tous, nous rendrons compte à Dieu de vos louanges ?[4] » Croyez-vous que ces éloges soient un honneur pour nous ? C’est une charge plus qu’un honneur. Il nous sera demandé un compte sévère de ces louanges, et je crains sérieusement que le Christ ne nous dise au jour de son jugement : Mauvais serviteur, vous receviez volontiers les acclamations de mon peuple, et vous gardiez sur leur mort un coupable silence. Mais le Seigneur notre Dieu nous accordera d’entendre à l’avenir du bien de vous, et dans sa miséricorde, il nous consolera par votre conversion. Ma joie sera d’autant plus grande alors que aujourd’hui ma tristesse est plus profonde.

DIX-HUITIÈME SERMON.
POUR LA FÊTE DU MARTYR QUADRATUS[5].

ANALYSE. —1. Trois sortes d’hommes vont à Dieu. —2. L’exemple de saint Paul leur est proposé. —3. Autre est celui qui voyage parfaitement, autre celui qui arrive parfaitement, ce qu’on voit dans saint Quadratus. —4. Donner maintenant à la justice autant qu’on a donné auparavant à l’impureté. —5. Et même on doit plus donner à la justice. —6. Et cela en dehors de tout respect humain. —7. Principalement à l’égard des païens qui insultent aux Chrétiens.

1. Le Seigneur notre Dieu nous a fait cette grâce, dont nous le remercions, de vous voir et d’être vu par vous. Et si nous voir en cette chair mortelle, « a rempli de joie notre

  1. Mat. 21, 31
  2. La ville de Simittu est à quelques milles de Bulle. On voit dans Vict. vit, parmi des noms d’évêques :Deuterius Simminensis, et Florentiu Seminensis ; l’un des deux doit appartenir à cette ville.
  3. L’évêque de Simittu
  4. Saint Augustin, à son arrivée, paraît avoir été reçu avec pompe.
  5. Au Codex, fol.51, on lit cette inscription : « Sermon de saint Augustin, évêque, sur l’amélioration de la vie, les progrès vers Dieu, avec l’éloge de saint Quadratus.— L’exorde nous montre que ce sermon ne fut point prêché à Hippone, mais dans quelque localité qui honorait saint Quadratus. Possidius en fait mention in Indicul. Opp, ch.9.