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VINGT-DEUXIÈME SERMON.
SUR LA FÊTE DE PÂQUES.
DEUXIÈME SERMON.

ANALYSE. — 1. Au moment où les disciples étaient en proie à la tristesse la plus profonde et les Juifs à une surveillance inutile, Jésus-Christ ressuscite. — 2. Il sort du tombeau scellé comme il était sorti du sein immaculé de sa mère. — 3. À la vue de l’Ange les saintes femmes et les disciples se réunissent, mais les Juifs frémissent de colère. — 4. La défaite des démons et des Juifs est pour les gentils une source abondante de lumières. — 5. Nous participons à la victoire de Jésus-Christ.

1. Frères bien-aimés, dans ce jour saint, illustre et glorieux, dans ce jour dont le Psalmiste a dit : « C’est le jour que le Seigneur a fait[1] », dans cet heureux jour la tristesse a disparu du cœur des disciples et le voile de la confusion s’est étendu sur les yeux des Juifs. En ce jour de la résurrection de Notre-Seigneur Jésus-Christ, les disciples étaient d’abord remplis de tristesse ; chacun d’eux s’éloignait où il pouvait, et personne n’était plus là pour les rassembler depuis que s’était accomplie cette parole : « Je frapperai le pasteur, et les brebis du troupeau seront dispersées[2] ». Toutefois le tombeau était revêtu du sceau des Juifs et entouré de soldats qui en défendaient l’entrée ; mais intérieurement ce tombeau était inondé d’une lumière dont rien ne pouvait empêcher la diffusion. Nous pouvons lier ce que nous revêtons de notre sceau ; mais nous ne pouvons lier la lumière. Voilà pourquoi Jésus-Christ, lumière éternelle qui a éclairé le monde dès le commencement, Verbe coéternel au Père, lequel Verbe est et sera toujours avec le Père dans l’unité du Saint-Esprit, formant ainsi un seul Dieu dans la Trinité des personnes, et la Trinité dans l’unité ; Jésus-Christ, disons-nous, Dieu et homme tout ensemble, lumière admirable et vérité infinie, a daigné toucher nos cœurs afin d’illuminer ce qui était obscur et d’ouvrir ce qui était fermé. C’est à la parole d’un Ange qu’il s’était incarné dans le sein de Marie, c’est encore un Ange qu’il prend pour témoin de sa résurrection, comme si le sceau apposé sur le sépulcre pouvait nuire à Celui que nulle imposture ne pouvait atteindre. Des gardiens étaient consignés et ils remplissaient leur mission. Ne savaient-ils pas que Celui qu’ils gardaient avait le pouvoir de faire des miracles, de chasser les démons, de guérir les lépreux, de ressusciter les morts ? Celui qui pouvait ressusciter les autres ne pouvait-il donc pas s’arracher lui-même au tombeau ?

2. Mais dans l’aveuglement de leurs cœurs, la foule des juifs, armés de la loi qu’ils ne comprenaient pas, chantaient le psaume troisième, mais ne connaissaient pas l’unité de Dieu dans la trinité des personnes. Le psaume troisième porte. « J’ai dormi et j’ai pris mon sommeil, et je suis ressuscité parce que Dieu m’a reçu[3] ». Or, pendant que ces Juifs, attentifs aux événements, se préparaient à couvrir de confusion les disciples, ils méritèrent de se sentir eux-mêmes écrasés sous le poids de la honte. Ils dirent à Pilate : « Scellons le tombeau, parce que ce séducteur a dit qu’il ressusciterait le troisième jour. Qu’on place donc des soldats, disent-ils, dans la crainte que les disciples ne viennent et ne l’emportent[4] ». Mais si le tombeau était fermé aux disciples, pouvait-il être fermé aux saints Anges ? Ne pouvait-il sortir du tombeau scellé, Celui qui avait pu naître d’une Vierge immaculée ? Votre Vierge a été scellée, votre sépulture l’a été également. Votre Vierge a engendré en dehors de tout concours de l’homme, et le sceau apposé sur le tombeau a été parfaitement inutile. Ces gardes que vous avez postés au sépulcre ne sont plus des gardes, mais des témoins. Ils pouvaient

  1. Ps. 118, 24
  2. Mat. 26, 31
  3. Ps. 3, 6
  4. Mt. 27, 63-64