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3. Notre Sauveur est donc né de la chair, mais non de la corruption charnelle ; il est né homme, mais n’a pas été engendré par l’homme. Il a pris notre chair, mais de manière à sauver l’honneur de sa majesté. Ainsi donc, en sauvegardant la pureté de sa naissance contre toute intervention de la corruption humaine, il s’est parfaitement soumis aux conditions de la nature humaine, mais sans s’éloigner en quoi que ce soit de la dignité de Dieu. Il passa dans ce monde tel qu’il s’était montré à sa naissance, dont il conserva la pureté par l’innocence de sa vie. C’est de lui seul, en effet, qu’il a été écrit : « Jamais le mensonge ne se trouva sur ses lèvres[1] » ; lui qui n’avait pas connu la corruption humaine dans sa conception, pouvait-il la connaître dans le reste de sa vie ? En effet, dit l’Apôtre, « il prit la forme d’esclave alors qu’il possédait la forme de Dieu[2]  ». Mes frères, tous les hommes avaient été esclaves du péché ; voilà pourquoi c’est à dessein que l’Apôtre nous dit du Sauveur qu’il ne prit que la forme d’esclave ; il revêtit substantiellement la nature humaine, mais sans en prendre les vices ; il eut la forme d’esclave, mais il n’en eut pas la culpabilité ; il eut de l’homme toute la nature, mais il n’eut pas la conscience du pécheur ; telle est la pensée de l’Apôtre : « Lorsqu’il était Dieu, il daigna prendre la forme d’esclave et parut réellement un homme ». Il avait de l’homme l’enveloppe extérieure, mais il possédait la puissance divine ; par le dehors il paraissait un esclave, mais dans sa nature il était Dieu ; extérieurement il montrait la faiblesse qu’il tenait de sa Mère, mais intérieurement il possédait la majesté de son Père ; extérieurement il n’avait que l’humble forme corporelle, mais intérieurement il brillait de tout l’éclat de la divinité.

4. Dans sa conduite au milieu des hommes, le Sauveur prouva sa double nature ; ses souffrances prouvèrent qu’il était homme, et ses miracles prouvèrent qu’il était Dieu. Il eut faim, et il multiplia les pains pour en nourrir ceux qui avaient faim. La faim qu’il ressentit prouvait qu’il était homme ; et en nourrissant miraculeusement la foule, il prouva qu’il était Dieu. Il pleura et consola ceux qui pleuraient. Ses larmes prouvaient qu’il était homme, et les consolations qu’il donnait aux autres prouvaient qu’il était Dieu. Il priait, et il exauçait les prières qu’il formulait. En priant, il montra qu’il était homme ; et en réalisant lui-même ce qu’il demandait, il montra qu’il était Dieu. En toutes choses il prouva ainsi sa double nature ; voilà pourquoi il est le Médiateur nécessaire entre Dieu et l’homme ; car, en inclinant les cieux, il a élevé la terre et il a réuni ces deux extrêmes dans une harmonie parfaite. Dieu et l’homme se trouvent réunis dans la personne de Notre Seigneur Jésus-Christ qui, sorti aujourd’hui du sein de la Vierge Marie, vit et règne éternellement avec Dieu le Père et le Saint-Esprit, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.


DIX-NEUVIÈME SERMON.

SUR L’ÉPIPHANIE DE NOTRE-SEIGNEUR.

ANALYSE. —1. Jésus-Christ révélé aux Juifs et aux Gentils. —2. Biens qu’il apporte aux uns et aux autres. —3. Les Mages l’adorent ; Hérode veut le faire mourir. —4. Massacre des Innocents. —5. Conclusion.
1. Il y a peu de jours, nous avons célébré, comme il vous en souvient, la naissance de Celui qui est appelé le Jour. En ce moment nous célébrons le mystère de sa manifestation, alors qu’il s’est révélé aux Gentils avec un éclat ravissant. En ce jour, selon le texte

  1. 1Pi. 2,22
  2. Phi. 2,16