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CENT VINGTIÈME TRAITÉ.

SUR LES PAROLES SUIVANTES : « PARCE QUE C’ÉTAIT LA VEILLE DU SABBAT, LES JUIFS », JUSQU’À CES AUTRES : « CAR ILS NE SAVAIENT PAS ENCORE CE QUE DIT L’Écriture, QU’IL LUI FALLAIT RESSUSCITER D’ENTRE LES MORTS ». (Chap. 19, 31-42 ; 20, 1-9.)

APRÈS LA MORT DE JÉSUS.

Lorsque le Sauveur eut rendu le dernier soupir, les soldats ne lui rompirent point les jambes, mais l’un deux lui perça le côté : Adam et l’Arche d’alliance avaient été la figure du Christ. Sur la demande de Joseph d’Arimathie, Pilate rendit le corps de Jésus : on le mit dans un sépulcre neuf, mais, le premier jour de la semaine, Madeleine et quelques autres disciples ne l’y trouvèrent plus.


1. Tout ce que le Sauveur prévoyait comme devant avoir lieu avant sa mort, ayant été accompli, il rendit l’esprit au moment choisi par lui. L’Évangéliste nous raconte ce qui arriva ensuite ; voici son récit : « Les Juifs, parce que c’était la veille du sabbat, afin que les corps ne demeurassent point sur la croix le jour du sabbat (car le sabbat était un jour très-solennel), prièrent Pilate de faire rompre les jambes aux criminels et de les enlever ». D’enlever non pas les jambes, mais les criminels, à qui l’on brisait les jambes pour les faire mourir et les détacher de la croix : on agissait ainsi, afin de ne point prolonger le supplice des crucifiés, et de ne point attrister par le spectacle de leurs tourments un grand jour de fête.
2. « Les soldats vinrent donc et rompirent les jambes de ceux qu’on avait crucifiés avec lui ; et, s’approchant de Jésus, quand ils virent qu’il était déjà mort, ils ne lui rompirent pas les jambes, mais un des soldats lui ouvrit le côté d’un coup de lance ; et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau ». L’Évangéliste se sert d’une expression choisie à dessein : il ne dit pas qu’on a frappé ou blessé le côté du Sauveur, ou qu’on a fait quelque autre chose semblable ; mais : « on l’a ouvert ». Effectivement, la porte de la, vie devait s’ouvrir à l’endroit où ont pris naissance les Sacrements de l’Église ; sans lesquels il est impossible d’arriver à la vie, qui est la seule véritable. Ce sang a été répandu pour la rémission des péchés ; cette eau est un salutaire liquide, car elle nous sert de bain et de breuvage. Dieu annonçait d’avance cet événement [1], en donnant à Noé l’ordre d’ouvrir, au flanc de l’arche, une porte par laquelle devaient entrer les animaux destinés à ne point périr sous les eaux du déluge ; ces animaux préfiguraient l’Église. Voilà encore pourquoi la première femme a été tirée du côté d’Adam, pendant qu’il dormait[2] ; voilà pourquoi elle a reçu le nom de vie et de mère des vivants [3]. même avant l’incalculable mal de sa prévarication, elle a été ainsi l’annonce d’un bien infini. Le second Adam, Jésus-Christ, ayant baissé la tête, s’est endormi sur la croix, pour qu’une épouse lui fût donnée, et, pendant son sommeil, cette épouse est sortie de son côté. O mort, qui fait revivre les morts ! Y a-t-il rien de plus pur que ce sang ? Quoi de meilleur pour guérir nos plaies ?
3. « Et celui qui l’a vu a rendu témoignage, et son témoignage est véritable, et il sait qu’il dit vrai, afin que vous aussi vous croyiez ». Jean ne dit pas : Afin que vous aussi, vous sachiez ; mais : afin que vous croyiez ; car celui qui a vu, sait, et celui qui n’a pas vu, doit croire à son témoignage. Le propre de la foi est plutôt de croire que de voir. Qu’est-ce, en effet, que croire une chose, sinon y conformer sa foi ? « Car cela a été fait pour accomplir ces paroles de l’Écriture : Vous ne briserez aucun de ses os. L’Écriture dit encore : Ils verront quel est celui qu’ils ont percé ». Il tire des Écritures deux témoignages à l’appui des différents faits dont il raconte l’accomplissement. Il avait dit : « Et s’étant approchés de Jésus, ils virent qu’il était déjà mort, et ils ne lui rompirent

  1. Gen. 6, 16
  2. Id. 2, 22
  3. Id. 3, 20