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commandement, quand il est envoyé comme un ange mauvais par la puissance qui le domine. 2 agit par permission, quand il demande et obtient quelque chose. L’un et l’autre n’ont lieu que pour l’épreuve des justes et la punition des méchants. Que crains-tu donc ? Marche dans le Seigneur ton Dieu, et sois tranquille. Ce qu’il ne veut pas que tu souffres, tu ne le souffriras pas ; et s’il permet que tu souffres, ce sera de sa part la correction d’un père, et non la condamnation d’un juge. Il veut nous préparer à l’héritage éternel, et nous refusons d’être corrigés ! Mes frères, à un enfant qui refuserait de recevoir un soufflet ou des coups de verge de la main de son père n’aurions-nous pas le droit de dire qu’il est un orgueilleux et qu’il n’offre plus aucune ressource, puisqu’il méconnaît l’intérêt que lui porte son père ? Cependant, pourquoi un père forme-t-il son fils, puisqu’il est un homme comme lui ? Pour l’empêcher de dissiper les biens temporels qu’il lui a acquis, qu’il a amassés pour lui, qu’il ne veut pas lui voir perdre et qu’il lui abandonne parce qu’il ne peut lui-même les posséder toujours. Il n’élève pas un fils qui doive posséder ses biens conjointement avec lui, mais un fils qui les possédera après lui. Mes fières, si un père élève avec ce soin un fils destiné à n’être que son successeur, et si ce fils ainsi élevé ne doit lui-même posséder ces biens que transitoirement, comme les possède celui qui le dirige, comment voudrions-nous n’être pas formés par notre Père dont nous ne devons pas être les successeurs, mais les associés, avec qui nous demeurerons à jamais dans un héritage qui ne passe pas, qui ne finit pas, qui n’a à craindre ni les orages ni les tempêtes ? Cet héritage n’est autre que lui-même, et il est notre père. C’est lui que nous posséderons, et nous ne voudrions pas recevoir de lui des leçons ? Supportons donc les enseignements d’un père. Quand la tête nous fait mat, ne recourons ni aux enchantements, ni aux sortilèges, ni aux vains remèdes. Mes frères, comment pourrai-je ne pas gémir à votre sujet ? Tous les jours je vois pareilles choses, et qu’y faire ? N’aurais-je donc pas encore réussi à persuader à des chrétiens qu’ils doivent mettre toutes leurs espérances dans le Christ ? Si quelqu’un est mort après avoir fait usage de ces remèdes (et de fait combien sont morts avec ces remèdes, et combien n’ont pas laissé de vivre sans y avoir recouru), de quel front sou âme est-elle allée vers Dieu ? Le signe du Christ a été effacé en lui, et sur lui a été tracé le signe du diable. Peut-être dira-t-il : Je n’ai point perdu le signe du Christ. Tu as donc porté en même temps le signe dit Christ et le signe du diable ? Le Christ ne veut pas de partage ; il veut posséder tout entier ce qu’il a acheté, Il l’a acheté assez cher pour le posséder seul, tu lui donnes pour copartageant le diable auquel tu t’es vendu par le péché. Malheur à ceux qui ont le cœur double[1], qui font dans leur cœur une part à Dieu et une part au diable, Dieu, irrité de voir qu’une part y est faite au diable, s’en éloignera, et le diable le possédera tout entier. Aussi n’est-ce pas sans raison que l’Apôtre a dit : « Ne donnez pas de place au diable [2] ». Connaissons donc l’Agneau, mes frères, connaissons le prix de notre rachat.
8. « Jean était là, et deux de ses disciples avec lui ». Voilà avec Jean deux de ses disciples. Jean était un si sincère ami de l’Époux, qu’il ne cherchait pas sa propre gloire mais qu’il rendait témoignage à la vérité. A-t-il prétendu voir ses disciples demeurer avec lui et ne pas suivre le Seigneur ? Au contraire il leur montre lui-même celui qu’ils doivent suivre : ils le regardaient comme l’Agneau ; mais il leur disait : Pourquoi me considérer comme tel ? Je ne suis pas l’Agneau, « Voici l’agneau de Dieu », le même dont il avait dit plus haut encore : « Voici l’Agneau de Dieu ». À quoi nous sert l’Agneau de Dieu ? « Voici celui qui efface le péché du monde ». L’ayant entendu, les deux disciples qui étaient avec Jean suivirent Jésus-Christ.
9. Voyons la suite : « Voici l’Agneau de Dieu ». C’est Jean qui parle. « Les deux disciples l’ayant entendu parler ainsi, suivirent Jésus. Jésus s’étant tourné, et les voyant qui le suivaient, leur dit : Que cherchez-vous ? Ceux-ci lui dirent : Rabbi, c’est-à-dire : Maître, où demeurez-vous ? » Ils ne le suivirent pas comme s’ils devaient rester désormais attachés à sa personne ; la circonstance où ils s’attachèrent à lui est connue ; c’est lorsqu’il leur fit quitter leur barque. En effet, l’un de ces deux disciples était André, ainsi que vous l’avez entendu tout à l’heure. Or, André était frère de Pierre, et nous savons

  1. Sir. 2, 14
  2. Eph. 4, 27