connaissait pas ? Ce pouvoir unique de donner le baptême que le Seigneur posséderait et se réserverait pour lui seul, pouvoir qui serait son apanage, soit pendant sa vie mortelle, soit quand, après son ascension dans les cieux, il ne cesserait d’exercer sur la terre sa puissance ; pouvoir en vertu duquel ni Pierre, ni Paul ne pourraient dire : Mon baptême. Aussi remarquez la manière dont se sont exprimés les Apôtres : faites-y bien attention ; aucun d’eux n’a dit : mon baptême. Bien que le même Évangile fût commun à tous, il s’en est trouvé pour lire : mon Évangile ; tu n’en trouveras aucun qui ait dit : mon baptême.
10. Voilà, mes frères ce que Jean a appris. Mais ce qu’il a aussi appris par la colombe, apprenons-le à notre tour. Car la colombe n’a pas instruit Jean, sans vouloir instruire aussi l’Église, cette Église à laquelle il a été dit : « Une est ma colombe[1] ». Que la colombe instruise donc la colombe. Que la colombe apprenne à connaître ce que Jean a appris de la colombe. C’est le Saint-Esprit qui est descendu en forme de colombe. Mais ce que Jean a ainsi appris, pour qui a-t-il dû l’apprendre de la colombe ? Assurément cette science lui était nécessaire, mais peut-être était-il aussi indispensable qu’il la reçût de la colombe ? Que dirai-je de la colombe, mes frères ? Mon cœur et ma langue me permettront-ils d’en dire ce que je voudrais et comme je le voudrais ? Ce que je veux en dire est peut-être au-dessous de ses mérites, si tant est, néanmoins, que je puisse seulement m’exprimer comme je le désirerais, à plus forte raison, comme il le faudrait. Aussi aimerai-je mieux entendre sur ce sujet un plus savant, que vous en parler moi-même.
11. Jean apprend donc à connaître celui qu’il connaissait déjà ; mais il apprend à le connaître sous un rapport sous lequel il ne le connaissait pas encore, et non à un point de vue où il le connaissait déjà. Que connaissait-il déjà ? Le Seigneur. Que ne savait-il pas encore ? Que le pouvoir de donner le baptême du Christ ne serait transmis par le Sauveur à aucun homme, tandis que la mission de le conférer en son nom serait confiée par lui à ses serviteurs ; en d’autres termes, il ignorait que la propriété du baptême resterait au Christ et que la mission de le donner en son nom passerait à ses serviteurs bons ou mauvais. Que la colombe ne considère pas avec horreur le ministère des méchants, qu’elle considère le pouvoir du Seigneur, Pourquoi t’inquiéter du méchant ministre, là où le Seigneur est bon ? En quoi te nuit la malice de celui qui marche devant le juge, si tu es sûr de la bienveillance du juge ? C’est là ce que Jean a appris par la colombe. Qu’a-t-il donc appris ? Que lui-même vous le dise encore une fois : « Celui qui m’a envoyé m’a dit : Celui sur qui tu verras descendre et demeurer le Saint-Esprit en forme de colombe, c’est celui qui baptise dans le Saint-Esprit ». O colombe, ne te laisse donc pas tromper par des séducteurs qui disent : C’est nous qui baptisons. Vois, ô colombe, ce que la colombe t’a enseigné : « C’est lui qui baptise dans le Saint-Esprit ». La colombe te dit que c’est lui, et si tu penses être baptisé par le pouvoir de ceux par le ministère desquels tu reçois le baptême, si tu penses ainsi, tu n’es plus du corps de la colombe, et si tu ne fais plus partie du corps de la colombe, il n’est pas surprenant que la simplicité te manque ; car la colombe est surtout Le symbole de la simplicité.
12. Pourquoi, mes frères, est-ce la simplicité de la colombe qui appris à Jean que « c’est le Christ qui baptise dans le Saint-Esprit ? » N’est-ce point parce que tous ceux qui sèment le trouble dans l’Église ne sont pas des colombes ? Ils sont des mitans et des oiseaux de proie. La colombe ne déchire pas. Aussi, tu le vois, ils nous en veulent et s’en prennent à nous, comme si nous étions les auteurs des persécutions qu’ils ont eu à subir. Ils semblent avoir souffert des tourments corporels ; en effet, Dieu les a punis dans le temps, pour les ramener au bien et ne point les punir pendant l’éternité, si toutefois ils comprennent et se corrigent. Mais en réalité, ils persécutent l’Église, puisqu’ils ne cessent de lui tendre des pièges : ils la blessent plus grièvement au cœur, puisqu’ils la frappent du glaive de leur langue, ils répandent le sang d’une façon plus cruelle qu’un homicide, puisqu’ils tuent le Christ dans leurs semblables, autant que cela dépend d’eux. Ou voit qu’ils sont effrayés, comme si les puissances les jugeaient. Pourquoi craindre la puissance, si tu es bon ? Si, au contraire, tu es méchant, redoute la puissance, « car ce n’est pas en vain qu’elle porte le
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