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28. « En lui fleurira ma sainteté[1] » En qui ? En mon Christ. Car cette expression : À mon Christ, est la parole du Père, qui dit : « Je comblerai sa veuve de bénédiction, et ses pauvres, je les rassasierai de pains. Ses prêtres, je les revêtirai du salut, et ses saints tressailliront d’allégresse ». Celui qui a dit : « C’est là que j’établirai la force de David », c’est Dieu le Père ; lui qui dit encore : « J’ai préparé une lampe à mon Christ », car le Christ est tout à la fois notre Christ, et le Christ du Père. Il est notre Christ, puisqu’il nous sauve et nous gouverne, de même qu’il est notre Seigneur, et le Fils du Père ; mais il est Christ, et pour nous et pour son Père. S’il n’était point le Christ, du Père, il ne serait point dit plus haut : « A cause de David votre serviteur, ne détournez point la face de votre Christ, Sur lui s’épanouira la fleur de ma sainteté ». C’est dans le Christ qu’elle fleurit. Que nul d’entre les hommes n’ose se l’attribuer, puisque c’est le Christ qui sanctifie ; autrement cette parole ne serait point vraie : « C’est en lui que s’épanouira la fleur de ma sanctification ». La gloire de ma sanctification s’épanouira. La sanctification du Christ est donc dans le Christ, et c’est dans le Christ que réside le pouvoir de Dieu dans la sanctification. « Elle fleurira », dit le Prophète, ce qui signifie la gloire. C’est quand les arbres fleurissent qu’ils sont dans leur beauté. Donc la sanctification est dans le baptême, qui lui donne sa fleur et sa gloire. Comment le monde entier s’est-il incliné devant cette beauté ? Parce que c’est la beauté du Christ, Mettez-la au pouvoir des hommes, comment fleurira-t-elle, puisque toute chair n’est que du foin, et toute la beauté de la chair n’est que la beauté d’une herbe[2] ?


DISCOURS SUR LE PSAUME 132

SERMON AU PEUPLE, EN FAVEUR DES MOINES ET CONTRE LES DONATISTES.

LE MOINE, OU L’UNITÉ DE CŒUR.

C’est le bonheur pour des frères de demeurer dans l’unité qui a enfanté leu monastères. Ceux qui le comprirent les premiers furent les Apôtres, puis les disciples qui n’avaient qu’un seul cœur. Comparez le moine catholique, humble et sobre, avec le Circoncellion ivrogne et furieux. Qu’il y ait de faux moines, cela tient à l’humanité, puisque ni parmi ceux qui gouvernent l’Église, ni parmi ceux qui servent Dieu dans le calme, ni parmi les gens du monde, tous ne seront point sauvés. Les hérétiques donnent à leurs solitaires le nom d’Agonistiques, du mot agon, combat ; puissent-ils justifier ce nom en combattant pour le Seigneur ! Les catholiques les appellent moines, de monos, seul, ou plusieurs en un seul par l’âme. Ils peuvent bien nous reprocher le nom de moines, eux qui ne reconnaissent l’unité ni dans l’Église ni dans les âmes.

Cette unité ressemble au parfum sur la tête d’Aaron, ou du souverain prêtre, lequel descend sur sa barbe, ou sur le signe de sa force, comme les Apôtres, comme Étienne le premier martyr, qui triomphe par la charité. Le parfum descend sur le bord du vêtement ou sur l’Église, qui est sans tache, puisqu’elle est purifiée dans le sang du Christ, sans ride puisqu’elle est étendue sur la croix. Ce bord est celui d’en haut qui donne passage à la tête, parce que le Christ entre chez nous par la charité fraternelle. Comme la rosée d’Hermon ; c’est-à-dire que tout cela s’accomplit en nous par la grâce de Dieu. Hermon signifie lumière d’en haut, et désigne le Christ, qui donne le calme et la paix, et dès lors l’unité des âmes. C’est dans celte paix que nous devons louer le Seigneur ; et si nous ne pouvons le trouver sur la terre, habitons dans le ciel par l’âme.


1. Notre psaume est court, mais célèbre et fort connu. « Qu’il est bon, qu’il est agréable pour des frères d’habiter ensemble[3] ». Il y a tant de douceur dans ce verset qu’on le chante quand même on ne connaîtrait point le Psautier. Il est doux comme est douce la charité qui réunit les frères dans une même demeure. Qu’il soit bon, qu’il soit agréable pour des frères d’habiter ensemble, c’est là ce qui n’a besoin ni d’explication ni de commentaire. Mais dans a suite il faut frapper, afin que la porte s’ouvre. Néanmoins, afin que ce premier verset nous donne

  1. Ps. 131,18
  2. Isa. 40,6
  3. Ps. 132,1