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qui baptisons. Mais dans l’enivrement de leur parole ils n’ont pu tenir fermes ; et dès lors ils n’appartiennent pas à cette maison dont il est dit : « Là se sont reposés ses pieds ».
15. « Levez-vous, Seigneur, entrez dans votre repos[1] ». C’est au Christ endormi que l’on dit : « Levez-vous ». Car vous savez qui dormi, et qui s’est levé ensuite. C’est lui qui dit en certain endroit des psaumes : « J’ai dormi tout agité[2] ». C’est donc avec raison qu’on lui dit : « Levez-vous, Seigneur, pour votre repos ». Vous ne serez plus agité : « Car le Christ ressuscitant d’entre les morts, ne meurt plus, la mort n’aura plus aucune puissance sur lui[3] ». C’est lui qui dit encore dans un autre psaume : « J’ai dormi, j’ai sommeillé, et je me suis levé, parce que le Seigneur m’a pris sous sa garde[4] ». C’est donc à celui qui a dormi, que l’on dit ici : « Levez-vous, Seigneur, entrez dans votre repos, vous et l’arche de votre sainteté ». C’est-à-dire : Levez-vous afin que se lève aussi l’arche de sainteté, que vous avez sanctifiée. Il est notre chef, son arche est son Église : il s’est levé le premier, et l’Église se lèvera ensuite. Or, le corps n’oserait se promettre de ressusciter si la tête ne l’avait fait la première. « Levez-vous, Seigneur, pour votre repos, vous et l’arche de votre sanctification ». Quelques-uns ont prétendu que cette arche de la sanctification désignait le corps du Christ né de la Vierge Marie ; en sorte que cette invitation : « Levez-vous, Seigneur, vous et l’arche que vous avez sanctifiée », signifierait : Levez-vous avec votre corps, afin que les incrédules puissent le toucher. « Levez-vous, Seigneur, pour votre repos, vous et l’arche de votre sainteté ».
16. « Que vos prêtres soient revêtus de justice, et vos saints dans la joie[5] ». Quand vous vous lèverez d’entre les morts, pour aller à votre Père, que ce sacerdoce royal soit revêtu de foi, car « c’est de la foi que vit le juste[6] » ; et qu’après avoir reçu le gage de l’Esprit-Saint, les membres se réjouissent dans l’espérance de la résurrection, qui a précédé dans le chef ; puisque c’est à eux que l’Apôtre a dit : « Réjouissez-vous dans l’espérance »[7].
17. « A cause de David votre serviteur, ne détournez point les regards de votre Christ[8] ». C’est au Père que l’on dit : « Ne détournez point la face de votre Christ, en considération de David votre serviteur ». Car le Seigneur a été crucifié en Judée, et crucifié par les Juifs ; c’est pendant qu’ils le troublaient qu’il a dormi. Après avoir dormi entre les mains de ces furieux, il s’est levé pour les juger ; et il a dit en quelque endroit : « Ressuscitez-moi, et je me vengerai d’eux[9] ». Il s’est vengé déjà, et doit se venger encore. Les Juifs savent bien ce qu’ils ont souffert après avoir fait mourir le Seigneur. Ils ont été bannis complètement de cette ville où ils l’avaient mis à mort. Mais quoi ! tous ceux de la race de David, de la tribu de Juda, ont-ils donc péri ? Non, car plusieurs d’entre eux embrassèrent la foi, c’est de là que sortirent ces milliers d’hommes qui crurent en Jésus-Christ après sa résurrection. Ils s’emportèrent jusqu’à le crucifier, et quand ils virent les miracles qui s’opéraient au nom du crucifié, ils n’en furent saisis que d’une plus grande frayeur, en voyant éclater la puissance de celui qui avait paru si faible entre leurs mains : et alors touchés de componction, ils crurent que la divinité était vraiment cachée dans cet homme[10] qu’ils avaient regardé comme un autre homme, puis ils demandèrent conseil aux Apôtres. « Faites pénitence, leur fut-il répondu, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ notre Seigneur[11] ». C’est donc parce que le Christ est ressuscité pour juger ceux qui l’ont crucifié, et qu’il a détourné son visage des Juifs, pour le tourner vers les Gentils, que le Prophète paraît le supplier en faveur des restes d’Israël, en disant : « A cause de David votre serviteur, ne détournez point la face de votre Christ ». Si la paille est condamnée, que le bon grain soit recueilli. Que les restes soient sauvés[12], comme le dit Isaïe. Or, ces restes ont été sauvés, puisque c’est de là que vinrent les douze Apôtres, et ces frères au nombre de plus de cinq cents à qui le Seigneur se montra après sa résurrection[13] ; de là ces milliers d’hommes qui se firent baptiser et apportèrent aux pieds des Apôtres le prix de leurs biens[14]. Ainsi donc fut accomplie cette prière que le Prophète adresse au Seigneur : « A cause de David votre serviteur ne détournez point la face de votre Christ ».

  1. Ps. 131,8
  2. Id. 56,5
  3. Rom. 7,9
  4. Ps. 3,6
  5. Id. 131,9
  6. Rom. 1,17
  7. Id. 12,12
  8. Ps. 131,10
  9. Id. 11,11
  10. Act. 2,37
  11. Id. 38
  12. Isa. 10,21
  13. Rom. 9,27 ; 1 Cor. 15,6
  14. Act. 2,41 ; 15,34