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que tu n’abandonnes plus la voie que tu auras choisie, et ne recherches plus l’indépendance. « Mes regards se fixeront sur toi ». Je te confirmerai dans mon amour.
9. « Loin de vous de ressembler au cheval et au mulet, qui n’ont point d’entendement ». De là vient qu’ils se veulent conduire eux-mêmes. Et le Prophète répond : « Assujettissez leurs mâchoires au mors et au frein »[1]. Faites pour eux, ô mon Dieu, comme l’on fait pour le cheval et le mulet, contraignez-les par la douleur à subir votre direction. « Eux qui refusent de s’approcher de vous ».
10. « ils sont nombreux, les châtiments des pécheurs »[2]. Il a de rudes châtiments à subir celui qui refuse d’avouer ses fautes à Dieu, et qui prétend se conduire lui-même. « Pour celui qui espère en vous, il sera investi de vos miséricordes »[3]. Mais le Seigneur réserve ses faveurs à celui qui l’a pris pour guide et a mis en lui son espoir.
11. « O vous qui êtes justes, réjouissez-vous dans le Seigneur, livrez-vous à l’allégresse Réjouissez-vous, non plus en vous, mais bien dans le Seigneur, ô vous qui êtes justes ! « Et vous tous qui avez le cœur droit, glorifiez-vous en lui »[4]. Glorifiez-vous tous en Dieu, vous qui comprenez que nous devons lui être soumis, afin qu’un jour vous ayez ses préférences.

DEUXIÈME DISCOURS SUR LE PSAUME 31.

LA FOI ET LES ŒUVRES.

Le salut nous vient de la foi et des bonnes œuvres qui suivent la foi. – Doctrine de saint Paul et de saint Jacques est en harmonie. – Foi d’Abraham. – Toute œuvre qui précède la foi est sans valeur. – Accord de saint Paul avec lui-même. – L’homme heureux est celui dont les péchés sont remis. – Nathanaël sous le figuier. – Confessons nos fautes comme le publicain. – Les eaux des doctrines. – La droiture du cœur.


1. J’ai entrepris, nonobstant ma faiblesse, d’exposer à votre charité, mes frères, le psaume que me signale principalement saint Paul, ainsi qu’a pu vous en convaincre la lecture que l’on vient de vous en faire, pour relever la grâce de Dieu et le mystère de notre justification qui s’opère sans que nulle de nos œuvres l’ait provoqué, mais par la bonté de Dieu notre Seigneur qui nous prévient. Soutenez donc tout d’abord ma faiblesse par vos prières, comme l’a dit l’Apôtre, « afin que Dieu m’ouvre la bouche et me donne de vous parler[5] », d’une manière qui soit sans péril pour moi et salutaire pour vous. Car ici l’esprit humain, naturellement inquiet et en suspens entre l’aveu de son infirmité et la présomption de ses forces, est souvent poussé deçà et delà avec un égal danger de tomber dans un précipice. En effet, s’il s’abandonne entièrement à sa propre faiblesse, dominé par cette pensée, il se dit que telle est la divine miséricorde pour tous les pécheurs, quels que soient leurs désordres et leur obstination, qu’à la fin ils recevront leur pardon, pourvu qu’ils croient que Dieu les délivrera, et leur pardonnera, en sorte que nul chrétien pécheur ne périsse, c’est-à-dire que nul ne puisse périr de tous ceux qui se disent en eux-mêmes : Quoi que je fasse, de quelque abomination, de quelque infamie que je sois souillé, quelque, nombreux que soient mes péchés, le Seigneur me délivrera dans sa miséricorde parce que j’ai cru en lui : si, dis-je, il en vient à croire que nul de ces coupables ne périt, il tombe dans une fausse croyance, sur l’impunité des crimes. Alors Dieu qui est juste, et dont le psaume chante la miséricorde

  1. Ps. 30,9
  2. Id. 10
  3. Ps. 31,10
  4. Id. 11
  5. Eph. 6,19