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en disant par son prophète : « Et tous les rois de la terre l’adoreront : tous les peuples le serviront[1]. »

CHAPITRE XXVIII. DESTRUCTION DES IDOLES PRÉDITE.

43. Nous voyons en effet, aujourd’hui, l’accomplissement de ce que le même Dieu a plusieurs fois déclaré par le prophète Isaïe ; qu’il repousserait son peuple impie et rebelle, non pas toutefois le peuple tout entier, puisque beaucoup d’israélites ont cru en Jésus-Christ, et que les Apôtres du divin maître étaient de cette nation qu’il humilierait tout superbe, tout insolent, afin que lui-même fût seul élevé, en d’autres termes, seul reconnu grand et puissant parmi les hommes : qu’un jour les fidèles se déclareraient partout contre les idoles et que les infidèles se verraient obligés de les cacher : que la terre serait brisée par la crainte, c’est-à-dire, que les hommes terrestres seraient consternés et remplis d’effroi, tant leur en imposerait la loi ou de ce Dieu lui-même, ou de ceux qui, croyant en lui et régnant sur les nations, s’opposeraient aux pratiques sacrilèges de l’idolâtrie.

44. Car voici le texte du prophète sur ce que je viens d’exposer brièvement pour, en rendre l’intelligence plus facile : « Et maintenant venez, maison de Jacob, et marchons ensemble à la lumière du Seigneur. Car le Seigneur a rejeté son peuple, la maison d’Israël ; parce que leur pays, comme autrefois quand y habitaient les idolâtres, a été rempli d’augures, et que beaucoup d’enfants leur sont nés du mélange de leur sang avec celui des étrangers. Leur terre a été remplie d’or et d’argent, et leurs trésors étaient infinis. Leur terre a été remplie de chevaux, et leurs chariots ne pouvaient se compter. Elle a été couverte des œuvres abominables de leurs mains, et ils ont adoré ce qu’ils avaient fabriqué de leurs propres doigts. Et l’homme s’est s’abaissé profondément et les chefs se sont dégradés : je ne leur pardonnerai point. Maintenant, entrez dans les fentes des rochers, cachez-vous dans les entrailles de la terre, pour vous mettre à couvert de l’effroi que répandra le Seigneur, et de l’éclat de sa puissance quand il viendra briser la terre. « Car le Seigneur est grand ; du haut du ciel ses regards embrassent l’étendue de l’univers, mais l’homme est une faible créature ici-bas ; et toute hauteur des hommes sera humiliée et le Seigneur sera seul exalté en ce jour. Oui le jour du Seigneur des armées va éclater sur tous les insolents, sur tous les superbes, sur tous ceux qui sont hautains dans leur bassesse et ils seront humiliés. Ce jour va éclater sur tous les cèdres orgueilleux du Liban, sur tous les arbres de Basan, sur les montagnes les plus hautes, sur les collines les plus élevées, sur tous les vaisseaux de la mer, dont il dissipera le beau spectacle. Et toute élévation de l’homme sera abaissée, et toute son insolence tombera, et le Seigneur seul paraîtra grand en ce jour. « Et, poursuivis par la crainte du Seigneur et la majesté de sa puissance quand il se lèvera pour frapper et ébranler la terre, les hommes cacheront dans les antres, dans les fentes des rochers, dans les cavernes tout ce qu’ils ont fabriqué de leurs mains. Car en ce jour on rejettera les idoles abominables d’or et d’argent, les idoles vaines et funestes qu’ils avaient faites pour les adorer, et ils entreront dans les trous de la pierre, dans les fentes des rochers, pour se mettre à couvert de la frayeur qu’apportera le Seigneur, et se dérober à la gloire de sa Majesté quand il se lèvera pour broyer la terre[2]. »

CHAPITRE XXIX. POURQUOI LES PAÏENS N’ADORENT-ILS PAS LE DIEU D’ISRAËL, S’ILS LE CROIENT DU MOINS PRÉPOSÉ AUX ÉLÉMENTS.

45. Que disent les païens de ce Dieu que les Hébreux appellent Dieu « Sabaoth », c’est-à-dire Dieu des Vertus ou des armées, parce que les vertus et toute l’armée des anges obéissent à ses lois ? Que disent-ils du Dieu d’Israël, ainsi appelé parce qu’il est le Dieu de ce peuple d’où nous est venu Celui en qui devaient être bénies toutes les nations ? Pourquoi le laissent-ils seul sans l’adorer, quand ils prétendent qu’on doit adorer tous les dieux ? Pourquoi refusent-ils de croire au Dieu qui a démasqué l’imposture des autres et les a renversés ? Suivant mes souvenirs, quelqu’un d’entre eux s’est flatté d’avoir lu dans les ouvrages de certain philosophe, dont le nom ne me revient pas, que les rites sacrés des Juifs lui avaient fait comprendre à quel Dieu s’adressait leur culte : « C’est, dit-il, à celui qui a la direction des éléments dont se compose le monde visible et corporel. » Cependant les livres vénérables

  1. Psa. 71, 11
  2. Isa. 2, 5-21