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à son éternité, à son immortalité, si tu accomplis ses préceptes, que certain de la mort, des flammes éternelles, de la damnation avec le diable, si tu les méprises. Il leur jura donc dans sa colère qu’ils n’entreraient point dans son repos ; et pourtant il faut que plusieurs entrent dans ce repos ; car il y en aura qui le posséderont. C’est donc nous qui prendrons la place des Juifs réprouvés ; car si plusieurs branches ont été retranchées à cause de leur dissemblance et de leur infidélité, notre foi et notre humilité nous feront insérer[1]. Entrons donc dans ce repos. Qu’est-ce qui a procuré à ceux qui y sont entrés, le bonheur d’y entrer, d’être élus, de n’avoir pas un cœur obstiné ? C’est qu’il est vrai que « Dieu n’a pas rejeté son peuple ».


DISCOURS SUR LE PSAUME 95[2].

LA MAISON DE DIEU OU L’ÉGLISE.

Cette maison, dont il est parlé dans le titre, c’est l’Église de Dieu, ou son temple, dont nous devons être les pierres, et qui embrassera l’univers entier ; le cantique nouveau, c’est le cantique de la charité de l’Évangile qui régnera aussi partout. Le temple de Jérusalem a disparu ; c’était le vieux temple ; le nouveau, c’est la charité qui unit les chrétiens. Et tous croiront, car le Saint-Esprit s’est montré sous la forme de langues de feu, pour montrer qu’il doit se répandre dans tous les peuples. Quiconque bâtit pour sa propre gloire, n’élève qu’une simple muraille blanchie, mais pas une maison ; cette muraille nous laisse toujours dehors, tandis que nous devons être abrités dans la maison de Dieu. On fait partie de ce temple et on le construit quand on comprend les abaissements de Jésus-Christ, il se bâtit dans les forêts, c’est-à-dire dans les nations idolâtres et dès lors esclaves des démons, esclavage dont nous sommes tous rachetés par le sang du Christ, assez précieux pour ne pas se borner au rachat de la seule Afrique. Pour délivrer les hommes, on leur prêche Celui qui a fait les cieux, ou les Apôtres, et les saints. On devient saint en se purifiant par la confession, afin de se dépouiller du péché, de s’en humilier. Apportons, pour offrandes, l’humilité afin d’entrer dans son parvis. Toute la terre, et non pas une seule partie, s’est ébranlée ou soulevée contre le Christ qui l’a calmée, qui l’a raffermie ou soumise par le bois. Alors se réjouiront et les campagnes ou les justes, et les forêts ou les païens convertis, qui profiteront du premier avènement du Christ pour n’avoir plus à redouter le second. Détachons-nous de tout ce qui passe pour attendre son équité et sa vérité.


1. Sévère, mon vénérable seigneur et frère[3], diffère encore notre joie au sujet du discours dont il nous est redevable, car il reconnaît lui-même qu’il nous le doit. Dans toutes les Églises qu’il a visitées sur son passage, Dieu a répandu la joie par sa bouche. Celte Église a bien plus de droit à cette joie, puisque c’est d’elle que Dieu l’a tiré pour le rendre si utile aux autres. Que faire de mieux, que nous soumettre, à sa volonté ? Toutefois, mes frères, je vous l’ai dit, il ne nous prive pas, il diffère seulement. C’est à vous à forcer ce débiteur, à ne point le laisser partir qu’il ne se soit acquitté. Que votre charité veuille bien écouter ; j’exposerai ce qu’il plaira au Seigneur de m’inspirer sur notre psaume ; vous le savez déjà, mais on se rappelle volontiers la vérité. Peut-être l’énoncé du titre a-t-il été pour plusieurs un sujet d’étonnement. Voici en effet le titre du psaume : « Quand on bâtissait la maison après la captivité ». À l’énoncé de ce titre, vous cherchiez peut-être, dans le texte du psaume, quelles pierres on allait tailler des montagnes, quelles masses on allait traîner, quels fondements seraient jetés, quelles poutres préparées, quelles colonnes élevées, Or, le psaume n’en dit rien : et néanmoins, s’il parle d’un autre sujet, faudra-t-il croire ou qu’il n’est pas d’accord avec son litre, et qu’il annonce un sujet pour en chanter un autre ? Et pourtant le sujet est le même, seulement il faut le comprendre. Il nous parle de la construction de l’édifice. Que toutes les pierres de cet édifice comprennent ce qu’elles ont chanté, car Dieu se bâtit un temple, mais non sur l’emplacement du temple de Salomon. Ce roi bâtit un temple au Seigneur[4], et vous savez

  1. Rom. 11,19-20
  2. Sermon prêché probablement l’an 405, durant les fureurs des Circoncellions
  3. Evêque de Milève
  4. 1 R. 6,1