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DISCOURS SUR LE PSAUME 77

LES FIGURES DE L’ANCIENNE LOI.

Le Prophète nous avertit de chercher un sens caché dans ces figures que tous les enfants de la synagogue n’ont pas comprises. Le Prophète, s’adressant au peuple, parle au pluriel, parce que tous doivent écouter la loi, et avec humilité. Ce peuple ou la génération venir, c’est l’Église formée des Juifs et des Gentils. Évitons les châtiments consignés par le Prophète, châtiments figuratifs bien au-dessous de la réalité, Il dit les énigmes dès le commencement, c’est-à-dire depuis la délivrance d’Égypte. Dieu commence à parler lui-même, puis il se sert d’un homme pour parler en son nom. Pour cet homme, le commencement c’est l’Ancien Testament que domine la crainte ; la fin, c’est le Nouveau avec la grâce et la charité. Dans l’un tout est promesse figurative, dans l’autre tout s’accomplit. La loi est un témoignage parce qu’elle a mis en évidence le péché ; les Juifs l’ont reflué pour la faire connaître aux chrétiens sans l’avoir eux-mêmes comprise, parce qu’ils n’avaient pas le cœur en haut, ni la foi en Dieu : ils ne s’attachaient point à Dieu pour faire le bien par sa grâce. Ils comptaient sur leurs œuvres, et ont tourné le dos an jour du combat ; eux, les privilégiés de Dieu, les premiers n’ont point gardé son alliance, et dais les œuvres extérieures leur cœur, qui n’était pas en Dieu, n’était pas d’accord avec les mains. Ils ont oublié les merveilles opérées en présence de Moïse, d’Aaron, des anciens qui étaient en Israël, comme saint Paul pour les premiers fidèles. L’Égypte est pour nous le monde, Tanis l’humilité. Dieu, qui retint les eaux, peut arrêter nos convoitises coupables, éclairer notre marche, nous abreuver de l’Esprit-Saint. Ils eurent soif, Ou mieux, leur cœur n’avait aucune sève, ils demandaient de la nourriture sans croire pie Dieu pût leur en donner. Dieu leur en donna d’abord, puis les châtia. La foi leur est donné le Verbe qui eût ouvert les nuées ou la bouche des prédicateurs pour en faire tomber la parole de l’Évangile, ce même pain qui nous vient par saint Paul. Notre indocilité provoque la colère du Seigneur qui n’épargne – pas même ses élus. Les Juifs recherchaient Dieu par crainte de la mort, et non pour lui-même ; ils attendaient de sa bonté L’impunité de leurs crimes. Dieu pardonne sans doute, mais en cette vie, comme il fit tant de fois pour ce peuple qui aurait dû profiter des plaies d’Égypte. Dieu se servit des mauvais anges pour exercer sa justice, comme il se sert quelquefois des bons. Quant aux incrédules, ils, sont la propriété des démons. L’endurcissement des Égyptiens est l’effet de l’abandon de Dieu, abandon qui les portait à haïr son peuple. Telle est la domination des mauvais anges, dont nous délivre la grâce de Dieu seulement, qui nous arrache à la puissance des ténèbres pour nous transporter au ciel, comme ce peuple arriva à la terre promise. Nous sommes alors les brebis du Seigneur, qui chasse devant nous les erreurs, nous met à la place des auges rebelles. Irrité de nouveau, Dieu rejeta le tabernacle de Silo, permit que l’arche fût prise, puis frappa les Philistins comme il frappe toute âme lâche. Il rejette en grande partie le peuple juif, choisit Juda d’où naquit le Christ ; de là le peuple chrétien fondé pour les siècles, enfanté par les églises juives, issu des Gentils, que Dieu fait paître dans la foi et dans l’innocence.


1. Ce psaume contient le récit de tout ce que Dieu a fait pour le peuple ancien le Prophète avertit le peuple nouveau d’éviter l’ingratitude à l’égard des bienfaits de Dieu, de ne point provoquer sa colère, de recevoir ses faveurs avec soumission et fidélité, de n’être point « comme leurs pères, une race indocile et rebelle, une race qui n’a point redressé son cœur, et dont l’âme n’a point mis sa confiance en Dieu[1] ». Tel est le but du psaume, son utilité, l’excellent fruit qui nous en reviendra. Bien que tout y soit clair, et facile à exposer, le titre néanmoins attire notre attention. Ce n’est pas sans sujet qu’il porte : « Intelligence d’Asaph[2] » ; c’est afin que, loin de s’arrêter à la superficie, le lecteur attentif cherche un sens plus caché. Puis, avant de rappeler et d’exposer toutes ces merveilles, qui semblent n’avoir besoin que d’être dites pour être comprises, le Prophète s’écrie « J’ouvrirai la bouche en paraboles, j’exposerai « les propositions depuis le commencement[3] ». Qui ne sortirait de son sommeil ? Qui oserait lire à la hâte et regarder comme intelligibles des figures, des paraboles, dont le nom seul indique un sens plus profond qu’il faut rechercher ? Parabole est en effet un mot grec employé dans le latin, et qui indique une comparaison ; car, chacun le sait, dans la parabole on compare ce que l’on dit avec ce que l’on veut faire entendre. Quant aux propositions, appelées en grec problemata ce sont des questions que la discussion doit résoudre. Qui donc alors oserait lire en courant des paraboles et des propositions ? Qui, au contraire, à ces mots, ne redoublerait d’attention pour les comprendre et en tirer du fruit ?
2. « Écoutez ma loi, ô mon peuple[4] », est-il dit. Qui parle de la sorte, sinon Dieu, croirons-nous ? C’est lui qui a donné sa loi à son peuple qu’il avait rassemblé après l’avoir tiré de l’Égypte ; et cette assemblée porte le nom

  1. Ps. 77,8
  2. Id. I
  3. Ps. 77,2
  4. Id. 1