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enfin je le posséderai, je serai sauvé et glorifié ; avant que luise pour nous ce jour fortuné, Dieu ne nous abandonnera pas quoiqu’il diffère de nous accorder ses dons éternels, il n’en est pas moins « mon soutien et la source de mon espérance ».
14. « O peuples, espérez tous en lui[1] ». Imitez Idithun ; devancez vos ennemis : laissez bien loin derrière vous ceux qui vous résistent, qui s’opposent à votre marche vers le ciel, qui vous haïssent. « O peuples, espérez tous en lui, répandez vos cœurs en sa présence ». Ne vous laissez point aller au découragement, quand on vous dira : Où est donc votre Dieu ? « Mes larmes », a dit le Prophète, « sont devenues mon pain durant le jour et pendant la nuit, parce qu’on me dit tous les jours : Où est ton Dieu ? » Et il a ajouté : « J’ai fait de cela le sujet de mes réflexions, et j’ai répandu mon âme pour l’élever au-dessus de moi[2] », J’ai gardé le souvenir de ce que j’ai entendu : « Où est ton Dieu ? » je me le suis rappelé, et j’ai répandu mon âme pour l’élever au-dessus de moi ». Je cherchais Dieu, et, pour parvenir jusqu’à lui, je suis sorti de moi-même, j’ai répandu mon âme et l’ai élevée au-dessus de moi. « O peuples, espérez donc tous en lui ; répandez vos cœurs en sa présence », et, pour cela, priez, confessez vos fautes, livrez-vous à l’espérance. Ne retenez pas vos cœurs, ne les emprisonnez pas en eux-mêmes, « répandez-les en sa présence » ; pour les répandre ainsi, vous ne les perdrez pas, Car il est mon protecteur ». S’il te protège, que craindrais-tu à répandre le tien ? Décharge-toi de toutes tes peines sur le Seigneur[3], et mets en lui ton espérance. « Répandez vos cœurs en sa présence ; il est notre soutien ». Pourquoi craindre les calomniateurs et les médisants qui vous environnent ? Dieu les déteste[4]. S’ils le peuvent, ils vous attaquent ouvertement : quand ils en sont incapables, ils vous tendent des pièges : ils feignent de vous louer : en réalité, ils vous maudissent, parce qu’ils sont vos ennemis ; mais, encore une fois, pourquoi les craindre ? « Dieu est notre soutien ». Sont-ils de force à lutter avec lui ? Sont-ils plus puissants que lui ? « Dieu est notre soutien ». Soyez donc tranquilles. Si Dieu est pour nous, qui est-ce qui sera contre nous[5] ? « Répandez vos cœurs en sa présence », en vous approchant de lui, en élevant vos âmes jusqu’à lui. « Dieu est notre soutien ».
15. Puisque vous êtes parvenus en lieu sûr, puisque vous êtes protégés contre vos ennemis par une tour inexpugnable, prenez pitié de ceux qui vous inspiraient de la crainte vous, aussi, vous devez éprouver les ardeurs de la soif, et courir : placés dans la forteresse, regardez les adversaires d’un œil de commisération, et dites : « Toutefois, les hommes « sont vains, les enfants des hommes sont menteurs[6] ». Enfants des hommes, jusques à quand aurez-vous le cœur pesant ? Vous êtes vains, enfants des hommes, vous êtes menteurs : pourquoi donc aimez-vous la vanité ? Pourquoi allez-vous à la recherche du mensonge[7] ? Tenez-leur ce langage imprégné de compassion et de sagesse. Si vous avez devancé vos ennemis, si vous les aimez, si vous ne prétendez détruire en eux le vieil homme qu’alla d’y faire naître l’homme nouveau, si vous aimez celui qui juge les nations et relève les ruines[8], tenez-leur ce langage ; mais, en leur parlant de la sorte, ne vous laissez point conduire par les sentiments de haine, ne cherchez point à rendre le mal pour le mal[9]. « Les enfants des hommes sont trompeurs dans leurs balances ; ils s’accordent ensemble dans la vanité ». Ils sont en grand nombre, mais en définitive ils ne font qu’un, et l’homme qui les représente tous dans sa personne, est celui-là même qui a été chassé du festin des noces[10]. Ils sont tous d’accord pour rechercher les avantages de ce monde ; ils sont tous charnels et ne veulent que les plaisirs de la chair ; et s’ils espèrent quelque chose pour l’avenir, leurs espérances sont aussi toutes charnelles. Divisés, pour tout le reste, en une multitude de partis différents, ils ne font plus qu’un dès qu’il s’agit de la vanité. Leurs erreurs sont innombrables, et se manifestent avec une surprenante variété de formes : un royaume ainsi divisé ne saurait subsister longtemps[11] ; mais, en eux tous on remarque un penchant égal et pareil de tous points pour la vanité et le mensonge, un dévouement absolu pour le même roi, pour ce maître avec lequel ils seront éternellement condamnés au feu[12]. « Ils s’accordent ensemble dans la vanité ».
16. Mais voyez quelle soif Idithun ressent

  1. Ps. 61,9
  2. Ps. 41,4-5
  3. Ps. 54,23
  4. Rom. 1,29-30
  5. Rom. 8,31
  6. Ps. 61,10
  7. Ps. 4,3
  8. Ps. 109,6
  9. Rom. 12,17
  10. Mt. 22,13
  11. Mt. 12,25
  12. Mt. 25,41