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ayant eu lieu du vivant de Josué. Le même fait est rappelé ici par mode de récapitulation, parce que l’Écriture raconte ce qui concerné la tribu de Juda, dont Caleb faisait partie.
VII. (Ib. 1,21, 8.) Les anciens habitants de Jérusalem ne furent pas tous détruits. – On demande pourquoi il est dit que les enfants de Benjamin « ne s’emparèrent pas du Jébuséen habitant à Jérusalem, et » que « le Jébuséen habita avec les enfants de Benjamin à Jérusalem, jusqu’à ce jour » puisqu’on dit plus haut que cette même ville fut prise par Juda, livrée aux flammes, et les Jébuséens qui l’habitaient exterminés. – Il faut savoir que les deux tribus de Juda et de Benjamin eurent cette ville en commun, comme on le voit dans le partagé même du pays qui fut fait par Josué [1]. Or cette ville de Jébus est la même que Jérusalem. Aussi, les deux tribus restèrent-elles auprès du temple du Seigneur, quand les autres, â l’exception de la tribu sacerdotale de Lévi, qui n’eut point de terres dans le partage, se séparèrent avec Jéroboam du royaume de Juda. – Il faut donc penser que, à la vérité, la ville fut prise et incendiée par Juda, et que tous les Jébuséens qui s’y trouvaient furent exterminés ; mais non pas que tous les Jébuséens absolument aient été détruits, soit qu’il, y en ait eu hors de la ville, soit qu’ils aient pu s’enfuir. Ce furent ces restes, de la nation des Jébuséens que les enfants de Benjamin laissèrent habiter avec eux dans la ville qui leur était commune avec Juda C’est pourquoi, quand il est dit que « les enfants de Benjamin ne s’emparèrent pas du Jébuséen » cela veut dire qu’ils ne purent ou ne voulurent pas rendre les Jébuséens tributaires ; cette parole « Il ne s’empara pas du Jébuséen » signifie, en tout, cas, que Benjamin n’occupa point le pays à l’exclusion du peuple qui en était possesseur.
VIII. (Ib. 1, 27.) Comment les Scythes ont-ils pu bâtir une ville en Palestine? – « Et Manassès n’obtint pas Bethsan, qui est une ville des Scythes. » C’est, dit-on, cette ville qui porte aujourd’hui le nom de Scythopolis. On pourra s’étonner que dans ces contrées si éloignées de la Scythes, il ait pu se trouver une ville de Scythes. Mais on pourrait s’étonner pareillement qu’Alexandre de Macédoine ait fondé une ville d’Alexandrie, si loin de la Macédoine, ce qu’il fit pourtant après avoir porté la guerre au loin de tout côté. Les Scythes ont pu de même créer cette ville, dans leurs lointaines expéditions. On lit en effet dans l’histoire profane que l’Asie presque tout entière fut un certain temps au pouvoir des Scythes, quand ils marchèrent contre un roi d’Égypte qui leur avait spontanément déclaré la guerre, et qui, saisi de terreur à leur arrivée, regagna ses états.
IX. (Ib. 1, 27.) Les villes fondées par une métropole en sont appelées les filles. – « Et Manassès n’obtint pas Bethsan, qui est une ville des Scythes, ni ses filles. » L’écrivain appelle « filles » de Bethsan, les autres villes fondées par cette métropole.
X. (Ib. 1, 28.) Un même fait raconté dans deux livres différents. – «. Et quand Israël l’eut emporté, il soumit le Chananéen au tribut, et il ne l’extermina pas. » Déjà quelque chose de semblable a été rapporté au livre de Josué, presque dans les mêmes termes[2]. C’est donc ici un résumé, ou bien c’était alors une anticipation, c’est-à-dire, ici on récapitule, ou bien alors ou racontait à l’avance.
XI. (Ib. 1, 34.) Encore un fait raconté deux fois. – « Et l’Amorhéen inquiéta les fils de Dan sur la montagne, et il ne les laissa pas descendre dans la plaine. » Ce fait a été pareillement raconté au livre de Josué par anticipation[3], ou bien c’est encore ici une récapitulation.

XII. (Ib. 2, 1.) Dieu reproche aux Israélites de n’avoir pas exterminé les Chananéens. – « Et l’Ange du Seigneur parut sur le mont des Pleurs. » L’Auteur de ce livre appelle ainsi le lieu de l’apparition, parce qu’il écrivait après l’événement ; car lorsque l’ange du Seigneur parut sur la montagne, celle-ci ne portait pas encore ce nom. Elle fut appelée, à cause des pleurs qu’on y versa, d’un nom qui en grec signifie pleurs : klauthmos. C’est là en effet que le peuple fondit en larmes en entendant de la bouche de l’Ange l’annonce de la vengeance de Dieu contre lui, à cause de sa désobéissance : il n’avait pas détruit les peuples vaincus, comme le Seigneur l’avait ordonné : il avait préféré leur imposer un tribut plutôt que de les anéantir, comme le Seigneur l’avait prescrit. Que le peuple ait agi par mépris pour les ordres de Dieu ; qu’il ait agi par crainte, appréhendant qu’un ennemi réduit à combattre pour sa conservation, n’opposât une résistance plus opiniâtre que pour échapper au tribut, il y a eu péché de la part du peuple certainement, soit par mépris des ordres du ciel, soit par défiance, comme

  1. Jos. 1, 63 ; 18, 28.
  2. Jos. 17, 18
  3. Id. 19, 48. selon les Sept.