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dans la terre que le Seigneur ton Dieu te donne en partage, que tu l’auras en ta possession et que tu y demeureras, si tu dis : J’établirai sur moi des princes, comme les autres nations qui sont autour de moi ; tu établiras sur toi le prince que le Seigneur ton Dieu aura choisi ; tu le prendras parmi tes frères ; tu ne pourras établir sur toi un homme étranger, qui ne soit pas ton frère. » On peut demander comment le peuple déplut à Dieu, lorsqu’il exprima le désir d’avoir un roi[1], puisqu’on lui permet ici d’en avoir un. Ce qui précède nous fait précisément comprendre qu’un tel désir n’était pas conforme à la volonté divine : car Dieu ne commande pas à son peuple d’avoir un roi, il ne fait que condescendre à son désir. Il voulut néanmoins que ce roi fût, non pas un étranger, mais un frère, un homme tiré du milieu de son peuple, au lieu d’un homme pris parmi les nations. Quant à cette expression : « Tu « ne pourras point » elle signifie : « Tu ne devras point. »
XXVII. (Ib. 17, 17.) Le roi n’aura pas un grand nombre de femmes. – Dieu dit, en parlant du roi : « Il n’aura pas une multitude de femmes, de peur que son cœur ne s’égare, et il n’amassera pas une immense quantité d’or et d’argent. » On demande à ce propos, si David n’agit pas contrairement à ce précepte ; car il eut plusieurs femmes[2]. Pour Salomon, il est évident qu’il ne tint aucun compte du commandement pour les femmes ni pour l’or et l’argent[3]. Toutefois, cette loi semble moins défendre aux rois la pluralité des femmes que la permettre, c’est l’abus du grand nombre qui fait l’objet de la défense ; en avoir un petit nombre, comme David, et non une multitude, comme Salomon, ne constituait donc pas une transgression de la Loi. Les mots qui suivent : « de peur que son cœur ne s’égare » semblent indiquer que le motif principal de la loi fut d’empêcher le roi de se laisser entraîner vers les femmes étrangères : ce sont elles, en effet, qui ont éloigné de Dieu le cœur de Salomon[4]. Cependant la défense dans sa généralité est telle, que quand même le roi n’aurait eu en grand nombre que des femmes de sa nation, il n’en aurait pas moins été coupable d’infraction à la Loi.
XXVIII. (Ib. 18, 7-8.) Sur les droits des Lévites qui viennent servir dans le saint Tabernacle.
– « Si un Lévite vient de l’une de tes villes répandues dans tout Israël, dans laquelle il habite, suivant le désir qu’éprouve son âme de demeurer au lieu que le Seigneur aura choisi » c’est-à-dire, s’il désire aller dans le lieu où l’on invoque le Seigneur, « il servira le nom du Seigneur son Dieu, comme tous les Lévites, ses frères ; qui se tiennent en présence du Seigneur il mangera la part qui lui revient comme membre de sa famille, outre la vente. » Le sens de ce mot « vente » est obscur. Peut-être cela signifie-t-il que les Lévites qui habitaient au loin, devaient vendre les dîmes et les prémices qui leur appartenaient, dans la crainte qu’ils ne fussent obligés d’emporter une foule de choses au lieu où l’on invoquait le Seigneur, ou d’amener leurs troupeaux ; avec le prix qu’ils en retiraient, ils pouvaient en acquérir d’autres. Dieu avait ordonné, en effet, de donner une part au Lévite, qui demeurait dans la ville où il avait le droit de recevoir les dîmes et les prémices, et il est dit que cette part était due au Lévite comme membre de sa famille, parce qu’on devait suivre à son égard la loi de succession qui veut qu’un fils succède aux droits de ses parents.
XXIX. (Ib. 18, 11.) Sur la nécessité de discerner les faux prodiges. – Puisque Dieu ne veut pas qu’il y ait dans son peuple des hommes qui tirent des augures, quel est le moyen de discerner les prodiges qu’il est interdit d’observer, d’avec ceux qui sont marqués à des caractères tellement divins, qu’ils demandent à être expliqué ; comme sont tous les miracles des Écritures, qui symbolisent des vérités en rapport avec la règle de la foi c’est ainsi que nous avons donné la signification de la toison mystérieuse, qui demeurait sèche tandis que la terre était humide, où se couvrait de rosée tandis que la terre était sèche[5] ; de la Verge d’Aaron, qui se couvrit de fleurs et de fruits[6], et d’autres miracles semblables ? De même donc qu’on distingue les divinations défendues ; des prédictions et des révélations des Prophètes ; ainsi doit-on distinguer les faux prodiges des miracles divins, qui se reconnaissent à leurs significations.
XXX. (Ib. 20,4.) Dans la vie spirituelle, l’homme doit coopérer à la grâce.
– « Car le Seigneur votre Dieu, qui marche à votre tête, combattra vos ennemis avec vous, et vous sauvera. » C’est ainsi que dans le combat de la vie spirituelle, il faut compter sur le secours de Dieu et te demander, non pas pour demeurer oisif, mais pour

  1. 1Sa. 8-7
  2. 2Sa. 5, 13
  3. 1Ro. 11, 1-4 etc
  4. Id. 4
  5. Jug. 6, 37-40
  6. Nom. 17, 8