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que ces mots : Son commandement, ont aussi le même sens. La voix et le commandement du Seigneur pourraient néanmoins s’entendre encore en ce sens que Dieu parlant à Moïse, selon sa coutume, avait ordonné qu’il en fût ainsi. Les Israélites, en effet, n’auraient pas su qu’ils devaient s’arrêter ou se mettre en marche avec la nuée, s’ils n’avaient été instruits par avance de leur devoir.
5. Mais, dans tout ce qui précède, il n’apparaît pas clairement encore si la marche n’avait lieu que pendant le jour, où si elle s’opérait également pendant la nuit au signal de la nuée. Car bien que les Israélites aient pu rester plusieurs jours dans leur camp, à cause de l’immobilité de la nuée, rien n’empêche que celle-ci ne se soit élevée que pendant le jour, pour donner le signal du départ. Aussi lisons-nous : « Et quand la nuée sera demeurée depuis le soir jusqu’au matin, et qu’elle se sera élevée le matin, et ils décamperont pendant le jour[1]. » La conjonction copulative n’est placée là que par un usage familier à l’Écriture. Car, en la supprimant, cette phrase offre un sens complet : « Et quand la nuée sera demeurée depuis le soir jusqu’au matin, et qu’elle se sera élevée le matin, ils décamperont pendant le jour. » Puis, comme ils levaient le camp, lors même que la nuée s’élevait pendant la nuit, et qu’ils se mettaient aussitôt en marche à ce signal, voici ce que l’Écriture ajoute : « Et si la nuée s’élève même pendant la nuit, ils lèveront leur camp. » La locution employée ici : vel nocte et si, est fort contraire à l’usage ; car nous n’y trouvons pas seulement la particule et, mais nous voyons qu’elle y occupe une place où elle ne se trouve pas d’ordinaire. Ce renversement de l’ordre grammatical des mots me paraît donc une de ces transpositions admises dans la langue latine elle-même. Ainsi qu’on dise : « Si la nuée monte même encore la nuit » ou bien : « si même la nuit la nuée monte, ils lèveront le camp » le sens est parfait dans l’un et l’autre cas.
6. Une autre question se présentait à l’esprit. On sait que les Israélites se mettaient en marche ou restaient campés des jours et des nuits, suivant ce signal de la nuée. Il s’agissait de savoir encore s’ils campaient seulement le jour, quand ils devaient marcher pendant la nuit. L’Écriture me semble avoir résolu cette question dans les paroles suivantes : « Le jour ou le mois de jour pendant lequel une nuée abondante couvrira le tabernacle, les enfants d’Israël seront dans le camp, et ne se mettront point en marche[2]. » Comme elle venait de dire : « si la nuée s’élève la nuit, ils décamperont », elle devait en quelque sorte achever la pensée en disant : mais si elle ne s’élève pas pendant le jour, ils ne marcheront point, lors même qu’ils croiraient devoir continuer leur marche : Cependant, comme il pouvait arriver que l’on marchât, pendant plusieurs nuits, sous la conduite de la nuée, et qu’on s’arrêtât avec elle, le même nombre de jours, l’Écriture a voulu précisément l’indiquer dans ces paroles : « le jour ou le mois de jour. » Elle n’a pas dit simplement : le mois, dans la crainte qu’on ne comprit les nuits avec les jours de ce mois ; mais elle a dit : le mois de jour, en prenant pour point de départ, le jour, et non la nuit. « Donc le jour ou le mois de jour, lorsqu’une nuée abondante couvrira » en d’autres termes, donnera une ombre abondante, ou couvrira d’une ombre très-abondante « le tabernacle, les enfants d’Israël seront dans le camp, et ne le lèveront point. » Enfin l’Écriture répète de nouveau que tout cela s’accomplissait d’après les ordres de Dieu, contre lesquels ne devait s’élever aucune résistance : « Car, ajoute-t-elle, ils marcheront au commandement du Seigneur. Ils observèrent la garde du Seigneur, suivant le commandement qu’ils en avaient reçu parla main de Moïse. » A ces mots, ils observèrent, le récit de l’Écriture reprend la forme du passé, Enfin ces dernières paroles : par la main de Moïse, sont un idiotisme fréquemment en usage dans le langage scriptural, et qui signifie que Dieu se servait de Moïse pour communiquer ses ordres.
XVII. (Ib. 10, 7.) Sur l’usage des trompettes. – « Et lorsque tu auras assemblé le peuple, tu sonneras de la trompette, et ce ne sera pas un signal. » Dieu ne fait donc point sonner de la trompette, pour assembler le peuple, sans quoi ce serait un signal ; mais, une fois le peuple réuni, il veut que la trompette sonne, et alors c’est comme un chant qu’elle entonne, et non un signal qu’elle donne pour faire quelque chose. Quand un homme du Testament nouveau interprète dans un sens spirituel ce concert des trompettes au moment où tout le peuple était réuni, ce fait est un signe pour lui, parce qu’il en comprend la raison ; mais c’était une énigme pour ceux qui ne comprenaient pas qu’on pût sonner de la trompette,

  1. Lev. 9, 21.
  2. Lev. 9, 22.