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– « Celui qui maudira son Dieu, portera son péché ; mais que celui qui nomme le nom du Seigneur, soit puni de mort. » On dirait que maudire son Dieu et nommer le nom du Seigneursont.deuxchoses différentes ; que l’une est un péché, mais que l’autre est un crime si énorme, qu’il mérite la mort. Il faut admettre cependant qu’il s’agit du nom du Seigneur prononcé avec malédiction. Quelle est donc la différence entre le péché d’une part, et ce qui d’autre part est considéré comme un si grand crime ? Cette répétition aurait-elle pour but de montrer que le blasphème n’est pas seulement un péché, mais encore un crime si considérable qu’il doit être puni de mort ? Ce qui fait l’obscurité de ce passage, c’est la forme disjonctive qui y est employée, l’Écriture disant : «mais que celui qui nomme », au lieu de «car celui qui nomme, etc. » A le bien prendre, c’est encore une locution à noter.
LXXXVIII. (Ib. 24, 17.) Sur l’homicide. – « Que l’homme qui a frappé l’âme d’un homme quelconque, et l’a fait mourir, soit puni de mort. » Nous ne lisons pas : Quiconque a frappé un homme, mais l’âme d’un homme, et l’a fait mourir ; et pourtant c’est plutôt au corps de l’homme que les coups se font sentir, suivant cette parole du Seigneur. « Ne craignez pas ceux qui donnent la mort au corps [1]. » Selon son habitude, l’Écriture désigne donc ici, sous le nom d’âme, cette vie du corps dont l’âme est le soutien, et par cette expression, elle a voulu faire comprendre que l’homicide est celui qui frappe l’homme dans son âme, c’est-à-dire dans sa vie. Mais pourquoi ajouter : «et l’a fait mourir », si les caractères de l’homicide sont suffisamment indiqués par ces mots, que l’homme a été frappé dans son âme, c’est-à-dire privé de la vie par son agresseur ? L’Écriture a-t-elle voulu expliquer en quel sens elle avait dit que l’âme de l’homme avait été frappée, et ces mots : « et l’a fait mourir », ne signifient-ils pas : au point que la mort s’en est suivie ? C’est en effet ce qu’elle veut dire par cette phrase : frapper l’âme d’un homme.

LXXXIX. (Ib. 25, 2-7.) Sur l’année sabbatique. – « Lorsque vous serez entrés dans la terre que je vous donne, et que la terre que je vous donne se sera reposée, arrivera le Sabbat du Seigneur. Tu sèmeras ton champ six ans de suite, tu tailleras aussi ta vigne, et tu en recueilleras le fruit durant six ans : mais la septième année, c’est le sabbat du Seigneur. » Comment faut-il entendre ce passage : « Lorsque vous serez entrés dans la terre que je vous donne, et que « la terre se sera reposée ; tu sèmeras ton champ « six années de suite etc ? » Ne semblerait-il pas que l’ordre de Dieu doit s’accomplir, quand la terre se sera reposée, tandis que le repos de la terre s’effectue précisément, parce qu’on obéit à ce commandement ? Dieu veut donner à entendre évidemment que la terre doit se reposer la septième année, pendant laquelle il est défendu à tous de se livrer à la culture des champs. Mais l’obscurité du sens vient d’une transposition trop longue. Voici donc l’enchaînement vraisemblable du récit : « Lorsque vous serez entrés dans la terre que je vous donne, et que la terre que je vous donne se sera reposée, pendant les sabbats du Seigneur. Tu ne moissonneras point ce qui lève de soi dans ton champ, et tu ne vendangeras pas le raisin de ta sanctification : ce sera l’année du repos de la terre. Et, pendant ce repos de la terre, tout ce qui naît de soi servira à te nourrir, toi, ton serviteur, ta servante, ton mercenaire et l’étranger qui s’est attaché à toi, et tes troupeaux et les animaux qui sont dans ta terre. » Les paroles suivantes, qui expliquent en quoi consiste le repos de la terre, ont été intercalées : « Tu sèmeras ton champ six ans de suite, tu tailleras aussi ta.vigneet tu en recueilleras le fruit du rapt six ans ; mais la septième année, c’est le sabbat, le repos de la terre, le sabbat du Seigneur. Tu ne sèmeras point ton champ, et tu ne tailleras point ta vigne. » Et par ce mot : tu ne tailleras point, nous devons entendre la défense absolue de toute culture dans le cours de cette année. Car si une vigne ne doit pas être taillée, elle, ne doit pas non plus être bêchée, ni liée, ni recevoir quelqu’autre soin qu’exige sa culture ; de même qu’on prend ordinairement la partie pour le tout, ainsi, dans.cecas, la taille de la vigne s’entend de tous les soins qui regardent son entretien. Le champ qu’il est défendu d’ensemencer, la vigne qu’il n’est pas permis de tailler, désignent aussi toute espèce de terre productive. Car la défense s’applique également à la culture de l’olivier ou de toute autre espèce de plantes, que l’Écriture ne nomme pas. Mais dans ces paroles : « Et pendant ce repos de la terre, tout ce qui naît de soi servira à te nourrir, toi, ton serviteur, ta servante etc ; » on voit assez clairement qu’il n’est pas interdit au maître du

  1. Mat. 10, 28