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précédemment ; or, quand a lieu la consécration d’Aaron, c’est Moïse lui-même qui offre et qui reçoit en ses mains la poitrine de l’imposition[1], et cependant, suivant ce qu’il avait dit antérieurement, cette portion de la victime devait être donnée au prêtre. Ce surnom de poitrine de l’imposition vient, ce me semble, de ce que la graisse en était déposée sur l’autel, selon l’ordre donné dans la loi sur ce sacrifice pacifique. Mais puisque le souverain sacerdoce paraît avoir commencé dans la personne d’Aaron, quelle idée nous faisons-nous donc de Moïse ? S’il ne fut point honoré du sacerdoce ; pourquoi en remplit-il ici toutes les fonctions ? S’il le fut, comment considérons-nous son frère comme le premier de tous les grands-Prêtres ? Il est vrai que ce passage du Psaume : « Moïse et Aaron furent au nombre de ses prêtres[2] », fait cesser le doute sur la participation de Moïse à la dignité du sacerdoce. Cependant c’est Aaron et les grands-prêtres, ses successeurs, qui sont appelés à recevoir le vêtement sacerdotal, type mystérieux de grandes choses[3]. Au livre de l’Exode, avant la description des rites qui concernent la sanctification et ce qu’on pourrait appeler l’ordination des prêtres, au moment où Moïse gravit la montagne, défense de monter est faite aux prêtres, qui n’étaient autres assurément que les enfants d’Aaron ; l’Écriture, suivant une manière de parler qui lui est familière, les nomme ainsi par anticipation : non qu’ils fussent déjà prêtres, mais parce qu’ils étaient appelés à le devenir[4]; c’est ainsi que le fils de Navé est appelé Jésus[5], longtemps avant l’époque où, suivant l’Écriture, ce surnom lui l’ut donné[6]. Moïse et Aaron étaient ils donc grands-Prêtres à la fois ? ou bien Moïse était-il le premier et Aaron le second ? Le souverain sacerdoce avait-il pour signe distinctif, dans celui-ci le vêtement du pontife, et dans celui-là l’excellence de la dignité ? Car il lui a été dit dès le commencement : « Il tiendra ta place auprès du peuple, et toi la sienne dans tout ce qui a rapport à Dieu[7]. »
3. On peut demander encore à qui revint, après Moïse, la charge de consacrer le grand-prêtre qui, sans aucun doute, ne pouvait succéder au précédent qu’après sa mort. Ayant déjà reçu l’onction sainte parmi les prêtres du second ordre, car l’huile qui sanctifiait le grand-Prêtre, servait également à l’onction des prêtres inférieurs, le nouveau Pontife se contentait-il de prendre le vêtement, qui était le signe distinctif de sa supériorité ? En ce cas prenait-il le vêtement lui-même ou bien un autre l’en revêtait-il, comme fit Moïse pour son neveu à la mort d’Aaron ? Si le grand-prêtre était vêtu par un autre, un prêtre du second rang ne pouvait-il donc s’acquitter de ce devoir ? Ce qui parait d’autant plus nécessaire que le vêtement du grand-prêtre exigeait l’aide d’une personne pour être mis. Ne l’en revêtait-il pas cette première fois comme les autres ? Car, après l’avoir mis, le grand-Prêtre ne le conservait pas toujours et quand il le déposait, c’était pour le reprendre ensuite. Rien donc n’empêchait que les prêtres du second ordre revêtissent le premier, non à titre de supérieurs, mais à titre d’inférieurs. Mais de quelle manière pouvait-on savoir à qui des enfants du grand-Prêtre revenait l’honneur de lui succéder ? Car l’Écriture n’assigne point cette succession au premier-né ou à l’aîné. Dieu sans doute le faisait connaître, soit par l’intermédiaire des Prophètes, soit dans ses réponses aux consultations qui lui étaient adressées : nous voyons cependant des contestations s’élever dans la suite à ce sujet, ce qui fut cause qu’il y eut plusieurs grands-prêtres à la fois ; car pour mettre un terme aux prétentions des prêtres les plus dignes de cet honneur, on l’accordait à plusieurs en même temps.
XXIV. (Ib. 8, 35.) Comment il faut entendre le mot s’asseoir. – Que signifie le commandement que Moïse adresse à Aaron et à ses fils, lorsqu’il les sanctifie pour leur entrée en fonction : « Vous serez assis, leur dit-il, jour et nuit, pendant sept jours, à l’entrée du tabernacle, de peur que vous ne mouriez ? » Est-il croyable que l’ordre leur ait été donné de rester, jour et nuit, pendant sept jours, dans la position d’un homme assis, sans changer absolument de place ? Rien cependant ne nous force à admettre, au lieu de la chose qui est irréalisable, une allégorie cachant un sens mystérieux ; il est préférable de voir dans ce passage une manière de parler particulière à l’Écriture ; elle dit s’asseoir, dans le sens d’habiter, demeurer. Par exemple, quand elle rapporte que Séméï s’assit trois ans à Jérusalem[8], il ne faut pas conclure de là que pendant tout ce laps de temps, il demeura constamment assis sur un siège, sans le quitter. Aussi

  1. 8, 15, 28
  2. Psa. 98, 6
  3. Exo. 28
  4. Exo. 19, 24
  5. Id. 33, 11
  6. Nom. 13, 17
  7. Exo. 4, 16
  8. 1Ro. 2, 38.