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depuis l’année de la naissance d’Isaac jusqu’à l’année de la sortie d’Égypte, on compte quatre cent-cinq ans. Si des quatre cent-trente années on, soustrait les vingt-cinq qui se trouvent entre la promesse et la naissance d’Isaac, il n’est pas étonnant que l’Écriture donne pour résultat le chiffre rond quatre-cent, au lieu de quatre-cent cinq : quand elle suppute les temps, elle ne tient pas compte en effet de quelques années en plus ou en moins et préfère employer un nombre rond. Ces mots du texte : « Elle sera réduite en servitude et persécutée » n’ont donc pas rapport aux quatre cents ans ; la servitude n’a pas eu la durée de cette longue période ; mais les quatre cents ans se rapportent à ces mots : « Ta race sera voyageuse dans une terre étrangère » car cette race fut voyageuse dans le pays de Chaman aussi bien qu’en Égypte, jusqu’au jour où elle reçut en héritage la terre que Dieu lui avait promise : ce qui s’accomplit quand eut lieu la délivrance de la servitude d’Égypte. Il y a donc transposition dans le texte, et les mots doivent se rétablir dans l’ordre suivant : « Sache bien que ta race sera voyageuse dans une terre étrangère pendant quatre cents ans » le reste : « elle sera.réduiteen servitude et persécutée » ne doit venir qu’après, et les quatre cents ans ne s’y rapportent point. Car c’est dans la dernière partie des années qui appartiennent à ce chiffre total, c’est-à-dire après la mort de Joseph, que le peuple de Dieu fut soumis en Égypte à une dure servitude.


XLVIII. (Ib. 13, 9.) Sur la foi et les œuvres.
– Pourquoi Dieu dit-il, en ordonnant la Pâque « Ce sera pour toi comme un signe sur ta main ? » Ces paroles signifient-elles : supérieur à tes œuvres, que tu doives préférer à tes œuvres ? Car, en raison de l’immolation de l’agneau, la Pâque se rapporte à la foi dans le Christ et dans le sang qui nous a rachetés. Or, cette foi doit passer avant les œuvres, elle doit être en quelque sorte sur la main, contrairement à l’opinion de ceux qui se glorifiaient dans les œuvres de la Loi. L’Apôtre parle sur cette matière et en traite longuement ; il veut que la foi marche avant les œuvres ; que les bonnes œuvres soient une conséquence de la foi et que celle-ci les prévienne ; enfin qu’on ne la considère pas comme une récompense du mérite des bonnes œuvres[1]. Car la foi a sa source dans la grâce : « or, si elle vient de la grâce, ce n’est donc pas des œuvres ; autrement la grâce ne serait plus grâce[2]. »
XLIX. (Ib. 13, 17.) Il faut écarter les obstacles au bien.
– « Or, Pharaon ayant laissé partir le peuple, Dieu ne les conduisit point par le chemin du pays des Philistins, qui était le plus court : car, disait-il, ce peuple se repentirait peut-être quand il verrait la guerre, et retournerait en Égypte. » On voit par là qu’il faut faire tout ce qui est prudemment possible, pour éviter les obstacles, quand même Dieu viendrait ouvertement en aide.
L. (Ib. 13, 18.) Que faut-il entendre par génération ?
– « Les enfants d’Israël sortirent de la terre d’Égypte à la cinquième génération. » L’écrivain sacré veut-il qu’une génération compte pour un siècle, et parle-t-il de la cinquième génération, parce que l’évènement qu’il raconte s’accomplit après les quatre cent-trente ans ? Ou bien, par générations, ne faut-il pas plutôt entendre celles qui se succèdent depuis Jacob à son entrée en Égypte jusqu’à Moïse qui en sortit à la tête du peuple ? Car on trouve Jacob à la première, Lévi à la seconde, Caath à la troisième, Ambram à la quatrième, et Moïse à la cinquième. Le traducteur latin a rendu par progenies ; le mot grec γενεἀς, que l’Évangile traduit par generationes : or, les générations se comptent par l’ordre de succession généalogique, non point par le nombre des années.


LI. (Ib. 14, 13.) Sur le sens de ces paroles : Vous ne verrez plus jamais les Égyptiens.
– Moïse dit : « Ayez confiance et demeurez fermes, et voyez le salut qui vient du Seigneur et qu’il vous accordera aujourd’hui. Car vous ne verrez plus jamais les Égyptiens, comme vous les avez vus aujourd’hui. » En quel sens faut-il prendre ces paroles, puisque les Israélites ont eu dans la suite l’occasion de voir des Égyptiens ? Est-ce en ce sens que ces mêmes Israélites, qui vol, aient actuellement les Égyptiens, ne les virent plus dans la suite : parce que ceux qui les poursuivaient étaient morts, et que ceux-ci à leur tour avaient tous cessé de vivre ? Car la postérité des uns a pu voir la postérité des autres. Ou bien ces mots : « Vous ne les verrez plus comme aujourd’hui[3] » signifient-ils : Vous ne les verrez plus comme aujourd’hui persécuteurs, ennemis et marchant à votre poursuite en si grand nombre ? Alors il n’y a plus de difficulté sérieuse, pas

  1. Rom. 11, 8
  2. Rom. 11, 8
  3. Rom. 11, 8