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Caath eût engendré le père de Moïse dans l’année de sa mort, et qu’Ambram à son tour eût engendré Moïse dans la dernière année de sa vie ; cent-trente, cent trente-sept et quatre-vingts font trois cents-quarante-sept, et non pas quatre cent-trente. Si l’on veut que Caath, fils de Lévi, soit né la dernière année de la vie de Joseph, c’est environ soixante-et-dix années qu’on peut joindre à ce total, car Joseph vécut soixante-et-onze ans en Égypte après l’arrivée de son père. Par conséquent, même en additionnant ces soixante-dix années de la vie de Joseph, depuis l’entrée de Jacob en Égypte jusqu’à la naissance de Caath, si tant est qu’il soit né à cette époque, – avec les cent-trente années que vécut Caath, les cent trente-sept de son fils Ambram, père de Moïse, et les quatre-vingts de Moïse lui-même, on n’aura encore que quatre cent dix-sept années, au lieu de quatre cent-trente. Il suit de là que la supputation, suivie par Eusèbe dans sa Chronique, a pour elle évidemment la vérité. Cet historien compte en effet les quatre cent-trente ans à partir de la promesse que Dieu fit à Abraham quand il l’appela de son pays dans la terre de Chanaan[1], et il s’appuie sur l’exemple de l’Apôtre, qui, après avoir loué et recommandé la foi d’Abraham dans la promesse que toutes les tribus de la terre seraient bénies en lui promesse où il voit une prophétie relative au Christ, – ajoute : « Ce que je veux dire, c’est que Dieu, ayant fait un testament en bonne forme, la Loi, qui a été donnée quatre cent-trente ans après, ne l’a pas annulé, ni anéanti les promesses[2]. » D’après l’Apôtre, c’est donc quatre cent-trente ans après la vocation d’Abra ham et lapromesse divine à laquelle crut ce patriarche, et non quatre cent-trente ans après l’entrée de Jacob en Égypte, que la Loi fut publiée. Au reste, le texte sacré le fait assez entendre ; car nous lisons dans l’Exode, non pas : « L’exil des enfants d’Israël » dans le pays d’Égypte fut de quatre cent-trente ans ; mais bien : « L’exil qu’ils passèrent dans le pays d’Égypte et dans le pays de Chanaan, eux et leurs pères. » Il est clair, par conséquent, qu’il faut faire entrer dans la supputation le temps que vécurent les Patriarches Abraham, Isaac et Jacob, depuis l’époque où Abraham mit le pied dans la terre de Chanaan, c’est-à-dire, depuis la promesse à laquelle il eut foi, ce dont l’Apôtre fait l’éloge, jusqu’à l’époque que où Israël descendit en Égypte. Durant ces longues années, en effet, les Patriarches, comme des voyageurs, vécurent en étrangers dans le pays de Chanaan, comme dans la suite les enfants d’Israël, en Égypte : c’est ainsi que le calcul exact de quatre cent-trente années se retrouve, en prenant pour point de départ la promesse, pour aboutir à la sortie d’Égypte, quand fut donnée sur le mont Sinaï la loi qui n’annulait point le testament et laissait intactes les promesses. En effet, au témoignage de l’Écriture, Abraham était dans sa soixante-quinzième année, quand il vint dans le pays de Chanaan[3], et il engendra Isaac à l’âge de cent ans[4]. Il s’écoula par conséquent vingt-cinq années entre la promesse et la naissance d’Isaac. En y ajoutant toutes les années de la vie d’Isaac, c’est-à-dire cent quatre-vingts, on a le chiffre de deux cent-cinq[5] : Jacob avait alors cent-vingt ans, car Isaac en avait soixante, quand il eut ses deux enfants jumeaux, Jacob et Esaü[6] ; dix ans après, Jacob entra en Égypte, âgé de cent-trente ans[7]. Joseph était dans sa trente-neuvième année. Depuis la promesse jusqu’à l’entrée de Jacob en Égypte, on compte donc deux cent-quinze ans. Joseph, âgé de trente-neuf ans, quand son père vint le trouver en Égypte, vécut encore soixante-et-onze ans, car il vécut jusqu’à l’âge de cent-dix ans[8]. Deux cent-quinze et soixante-et-onze font deux cent quatre-vingt-six. Restent deux cent quarante-quatre ou cinq années, qu’on admet pour la durée de la servitude des Israélites en Égypte après la mort de Joseph. En ce qui concerne leur multiplication prodigieuse pendant ce laps de temps, si l’on tient compte de la puissance d’engendrer dans l’homme et de la bénédiction de Celui qui voulut opérer cette merveille, on n’aura plus lieu de s’étonner que le peuple d’Israël sortit d’Égypte au nombre de six cent-mille hommes de pied, sans parler de la suite où se trouvaient les serviteurs, les femmes et tous ceux qui étaient incapables de porter les armes. Lorsque Dieu dit à Abraham : « Sache bien que ta race sera voyageuse dans une terre étrangère, et qu’elle y sera réduite en servitude, et persécutée pendant quatre cents ans » il ne faut donc pas entendre ces paroles, en ce sens que le peuple de Dieu fut aussi longtemps réduit à la plus dure servitude ; mais il est écrit. « D’Isaac sortira la race qui portera ton nom[9] »

  1. Eusèb. Chroniq an du monde 3260.
  2. Gal. 3, 17
  3. Gen. 12, 4
  4. Id. 21, 5
  5. Id. 35, 28
  6. Id. 25, 26
  7. Id. 48, 9
  8. Id. 50, 22
  9. Id. 21, 12