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paroles : « Ses fondements sont établis sur les montagnes saintes. » Mais, comme il est dit ensuite : « Le Seigneur aime les portes de Sion » il est question nécessairement dans ce passage des fondements du Seigneur ou de Sion, et mieux, dans un sens plus naturel, des fondements de cette cité. Toutefois comme le pronom ejus est d’un genre indéterminé (car il est de tout genre, masculin, féminin et neutre,) tandis qu’en grec on dit ἀυτὴς au féminin, et ἀυτοῦ pour le masculin et le neutre, et que le texte grec porte du ἀυτοῦ, il s’agit évidemment ici, non point des fondements de Sion, mais des fondements du Seigneur, c’est-à-dire, de ceux qu’il a établis conformément à ces paroles : « C’est le Seigneur qui bâtit Jérusalem[1]. » Et cependant avant de dire : « Ses fondements sont établis sur les montagnes saintes » le Psalmiste n’avait parlé ni de Sion ni du Seigneur ; de même, ici, sans qu’il eût été fait mention de l’enfant, il est dit : « Il se présenta à lui, et cherchait à le mettre à mort » et c’est parla suite du récit que nous découvrons de qui il est question. Néanmoins si quelqu’un préfère appliquer ce passage à Moïse, il ne faut pas beaucoup disputer avec lui sur ce point. Mieux vaut, s’il est possible, avoir l’intelligence de ce qui suit : Pourquoi l’Ange se garda-t-il de mettre à mort l’un ou l’autre, quand la femme eut dit : « Le sang de la circoncision de l’enfant s’est arrêté ? » Car l’Écriture ne dit pas l’Ange laissa l’enfant, parce que sa mère le circoncit, mais, parce que le sang de la circoncision s’arrêta ; non parce qu’il sortit à flots, mais parce qu’il cessa de couler. Si je ne me trompe, il y a ici un grand mystère.
XII. (Ib. 4, 20.) Contradiction apparente.
– Il est dit que Moïse mit sa femme et ses enfants sur des chars, pour se rendre avec eux en Égypte, et plus loin, que Jéthro, son beau-père, vient au-devant de lui avec les mêmes personnes, après que Moïse a tiré son peuple de l’Égypte[2] ; on peut demander comment la vérité s’accorde avec ces deux passages. Mais il faut croire que Séphora reprit avec ses enfants le chemin de son pays, lorsque l’Ange menaça de mort Moïse ou l’enfant. Car, au sentiment de plusieurs interprètes, l’Ange mit l’épouvante dans son âme, afin que la compagnie d’une femme ne fût point un obstacle à la mission que Moïse avait reçue de Dieu.


XII. (Ib. 5, 1-3.) Dieu n’ordonne que ce qu’il veut qu’on fasse.
– Pourquoi dit-on au peuple que Dieu a donné l’ordre de le transporter de l’Égypte dans la terre de Chanaan : tandis qu’on dit à Pharaon que les Hébreux veulent aller trois journées de chemin dans le désert, pour offrir au Seigneur le sacrifice qu’il leur a commandé ? Quoique Dieu sût ce qu’il ferait, car il avait la prescience que Pharaon ne consentirait pas au départ de son peuple, il faut se persuader que ses premiers ordres se seraient accomplis, si le peuple eût été libre de partir. Et si les évènements se passèrent comme l’Écriture en fait plus loin la description, c’est à l’obstination de Pharaon et des siens qu’en revient la responsabilité. Car Dieu ne prescrit point d’une manière menteuse des ordres qu’il sait devoir être transgressés, pour exercer ensuite envers le coupable la justice de ses jugements.
XIV. (Ib. 5, 22-23.) Prière de Moïse.
— Lorsque Moïse dit au Seigneur : « Pourquoi avez-vous affligé votre peuple ? Et pourquoi m’avez-vous envoyé ? Car depuis que je me suis présenté à Pharaon pour lui parler en votre nom, en faveur de votre peuple, vous n’avez pas opéré sa délivrance » ce ne sont pas là des paroles inspirées par la désobéissance ou l’indignation ; c’est une question et une prière : on le voit par la réponse que lui adressa le Seigneur. Il ne lui fait point un reproche de son manque de foi, mais il lui fait part de ses desseins pour l’avenir.


XV. (Ib. 6, 14-28.) Généalogie de Moïse.
– 2 n’est point douteux que l’Écriture voile ici quelque mystère. Car voulant établir la généalogie de Moïse, ainsi que l’exigeait le sujet lui-même, elle commence par l’aîné de Jacob, c’est-à-dire par Ruben, puis de là vient à Siméon, et enfin à Lévi ; elle ne va pas plus loin, parce que Moïse était descendant de ce dernier. Si elle nomme les autres, c’est qu’ils avaient été déjà été mentionnés parmi les soixante-quinze personnes qui firent leur entrée en Égypte avec Israël : car ce n’était ni la première tribu, ni la seconde, mais ta troisième, celle de Lévi, que Dieu destinait au ministère sacerdotal.
XVI. (Ib. 6, 30.) Moïse s’excuse sur la faiblesse de sa voix.
– Quand Moïse dit : « Je suis d’une voix grêle, et comment Pharaon m’écoutera-t-il ? » il semblerait qu’il allègue la faiblesse de sa voix pour s’excuser de ne pouvoir se faire entendre, non-seulement de la multitude mais même d’un seul homme. Or, il serait étonnant que sa voix eût été faible à ce point qu’il ne pût se faire entendre

  1. Ps. 146, 2
  2. Ex. 18, 1-5