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LIVRE XI. CHUTE ET CHÂTIMENT D’ADAM.

CHAPITRE PREMIER. CITATION DU TEXTE ; PRÉLIMINAIRES.


1. « Adam et sa femme étaient nus tous deux et ils n’en avaient point de honte. Or le serpent était le plus rusé de tous les animaux qui sont sur la terre et que le Seigneur Dieu avait faits. Et il dit à la femme : Quoi ! Dieu vous aurait-il dit : Vous ne mangerez pas de tout arbre du jardin ? Et la femme répondit au serpent : Nous mangeons des fruits des arbres du jardin ; mais quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : Vous n’en mangerez point, et vous n’y toucherez pas, de peur que vous ne mouriez. Alors le serpent dit à la femme : Vous ne mourrez nullement. Mais Dieu sait qu’au jour où vous en mangerez, vos yeux seront ouverts, et vous serez comme des Dieux connaissant le bien et le mal. La femme donc voyant que le fruit de l’arbre était bon à manger, agréable à la vue et désirable pour donner de la science, prit du fruit, en mangea, en donna à son mari comme à elle, et ils en mandèrent. Et leurs yeux furent ouverts et ils reconnurent qu’ils était nus ; et ayant cousu ensemble des feuilles de figuier, ils en firent des ceintures. Et ils entendirent la voix du Seigneur Dieu qui se promenait dans le jardin vers le soir. Adam et Eve se cachèrent de devant la face du Seigneur Dieu, au milieu des arbres du Paradis. Et le Seigneur Dieu dit : Qui t’a montré que tu étais nu, sinon parce que tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de manger ? Et Adam répondit : La femme que vous m’avez donnée pour compagne, m’a donné du fruit de l’arbre et j’en ai mangé. Et Dieu dit à la femme : Pourquoi as-tu fait cela ? Et la femme répondit : Le serpent m’a trompée et j’en ai mangé. Alors le Seigneur Dieu dit au serpent : Puisque tu as fait cela, tu seras « maudit entre tous les animaux et entre toutes les bêtes des champs ; tu ramperas sur ton ventre et tu mangeras de la poussière tous les jours de ta vie. Et je mettrai de l’inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et la postérité de la femme : elle t’observera à la tête et toi tu l’observeras au talon. Puis il dit à la femme : Je multiplierai énormément tes douleurs et tes gémissements : tu enfanteras dans la peine, tu te tourneras vers ton mari et il te dominera. Puis il dit à Adam : Parce que tu as écouté la voix de ta femme et que tu as mangé de l’arbre auquel seul je t’avais ordonné de ne pas toucher, la terre sera maudite dans ton travail : tu en mangeras tous les jours de ta vie avec tristesse. Elle te produira des épines et des chardons, et tu mangeras l’herbe des champs. Tu mangeras le pain à la sueur de ton visage, jusqu’à ce que tu retournes en la terre d’où tu as été pris ; car tu es poudre et tu retourneras en poudre. Et Adam appela sa femme la Vie, parce qu’elle a été la mère tous les vivants. Et le Seigneur Dieu fit – à Adam et à sa femme des tuniques de peaux et les en revêtit. Et le « Seigneur Dieu dit : Voici que l’homme est devenu comme l’un de nous, sachant le bien et le mal : or il faut prendre garde maintenant qu’il n’avance la main et ne prenne aussi de l’arbre de vie et qu’il n’en mange à toujours. Et le Seigneur Dieu le fit sortir du jardin d’Eden pour labourer la terre dont il avait été pris. Alors il chassa Adam et le plaça à l’opposé du jardin d’Eden : il plaça aussi des Chérubins avec un glaive de, flamme qui se tournait çà et là, pour garder le chemin de l’arbre de vie[1]. »
2. Avant d’expliquer ce texte dans tous ses détails, je crois devoir rappeler, comme je l’ai déjà fait ici, que le but de cet ouvrage est de commenter littéralement les faits dont l’écrivain sacré nous donne le récit historique. Si les paroles de Dieu, ou celles des personnages qu’il a choisis pour remplir le rôle des prophètes, nous présentent quelquefois des expressions qui ne sauraient s’entendre à la lettre sans devenir absurdes, il faut y voir un sens figuré : il serait néanmoins impie de douter qu’elles aient été réellement prononcées ; on ne doit pas attendre moins de

  1. Gen. 2, 25 – 3, 24