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LIVRE V. TOUT CRÉÉ EN MÊME TEMPS.

CHAPITRE PREMIER. LES 6 ou 7 PREMIERS JOURS PEUVENT ÊTRE REGARDÉS COMME LE RETOUR PÉRIODIQUE D’UN JOUR PRIMITIF.


1. « C’est là le livre de la création du ciel et de la terre, quand le jour fut fait, et que Dieu fit le ciel et la terre, toute la verdure des champs avant qu’il y en eût sur la terre, toutes les herbes des champs avant qu’elles poussassent. Car Dieu n’avait point encore fait pleuvoir sur la terre et il n’y avait point d’homme pour la cultiver ; mais une source montait de la terre et en arrosait toute la surface » l’Écriture fournit ici une nouvelle preuve à l’appui de l’opinion suivant laquelle Dieu fit un jour dont les six ou sept autres ne furent que le retour régulier ; car, après avoir résumé en quelque sorte la création, elle ajoute ces expressions significatives:« Quand le jour fut créé. » On ne dira pas sans doute que le ciel et la terre dont il est ici question soit le même ouvrage que celui qui précéda la création du jour, d’après ce passage : « Au « commencement Dieu fit le ciel et la terre. » Si on veut voir là une création accomplie par Dieu en dehors du jour, et avant sa naissance, j’ai exposé comment elle était possible, sans interdire à personne une théorie plus satisfaisante que la mienne. Quoi qu’il en soit, l’Écriture montre assez dans le passage : « Voici le livre des origines du ciel et de la terre,[1] quand le jour fut fait » qu’elle ne voit point ici dans le ciel et la terre l’ouvrage qui fut créé au commencement, avant la naissance du jour, lorsque les ténèbres étaient sur l’abîme : il est clair, à mon sens, qu’elle parle du ciel et de la terre, tels qu’ils furent formés, après la création du jour, en d’autres termes, avec cet ordre qui distribua les éléments, disposa les êtres selon leur espèce, qui donna enfin à la création entière cette organisation et cette harmonie que nous appelons le monde.
2. Le ciel n’est donc ici que le firmament, tel qu’il fut créé et nommé par Dieu, avec tous les êtres qu’il renferme ; et la terre n’est que la région inférieure avec l’abîme et avec tous les êtres qu’elle contient. Cela est si vrai que l’Écriture ajoute immédiatement : « Dieu fit le ciel et la terre. » En parlant du ciel et de la terre, avant comme après la formation du jour, elle ne permet pas même de conjecturer qu’elle voit ici dans ces deux ouvrages la même création que celle qui précéda la naissance du jour. Car dans le passage : « C’est là le livre des origines du ciel et de la terre, quand le jour fut fait et que Dieu fit le ciel et la terre » l’arrangement même des mots ne permet pas de voir, dans le premier membre de phrase, le ciel et la terre tels que Dieu les fit au commencement, avant la création du jour ; on ne saurait s’arrêter à cette opinion, sous prétexte que le ciel et la terre sont nommés avant la création du jour, sans être aussitôt arrêté par le texte sacré où la création du jour est à peine signalée que l’on revient à la formation du ciel et de la terre.
3. La valeur seule de la ##Rem conjection quand, dans ce passage, suffirait à un dialecticien pour soutenir que tout autre sens est impossible : retranchez-la, en effet, et dites : Voici le livre des origines du ciel et de la terre, le jour fut créé, Dieu fit le ciel et la terre ; on pourrait alors s’imaginer qu’il n’est question dans le premier membre de phrase que du ciel et de la terre, tels qu’ils furent créés au commencement, avant la naissance du jour ; que la création du jour est mentionnée ensuite, comme elle l’est effectivement dans le récit qui ouvre la Genèse, et qu’enfin le dernier membre de phrase a trait à la création du ciel et de, la terre ; qu’ils furent organisés après la formation du jour. Mais la conjonction rattache la proposition qu’elle annonce, au début de la phrase, ou à la fin, en d’autres termes, il faut lire : « Voici le livre des origines du ciel et de la terre, quand le jour fut fait » ou : « quand le jour fut fait, Dieu créa le ciel et la terre » dans les deux cas, on est forcé de convenir que l’Écriture n’a voulu ici parler que de la formation du ciel et de la terre accomplie lorsque le jour eut été créé D’ailleurs, les expressions qu’ajoute l’Écriture : « Toute la verdure de la terre » se rapportent sans conteste au troisième jour. On voit donc clairement que Dieu créa un seul et même jour qui, en se renouvelant régulièrement, produisit la période des six jours.

  1. Gen. 2, 4-6