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les oiseaux du ciel, sur les animaux domestiques, sur toute la terre et sur tout reptile qui rampe Sur la terre. Dieu créa donc l’homme à son image, il le créa à l’image de Dieu ; il les créa mâle et femelle. Et Dieu les bénit et leur dit : Croissez et multipliez-vous, et remplissez la terre assujétissez-la, et dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et toute bête qui se meut sur la terre. Et Dieu dit : Voici que je vous ai donné toute herbe ayant sa semence et tout arbre portant sa semence en soi : ce sera votre nourriture. Mais j’ai donné à toutes les bêtes de la terre, à tous les oiseaux du ciel, à tout animal qui se meut sur la terre et a la vie en soi, toute herbe verte pour leur servir de « nourriture. Et il en fut ainsi ; et Dieu vit, tout ce qu’il avait fait : et voici que tout était très-bon. Et le soir arriva et au matin s’accomplit le sixième jour[1]. » La nature de l’homme offrira bientôt un vaste sujet à nos réflexions. Bornons-nous maintenant à remarquer, pour terminer nos considérations sur les œuvres des six jours, que Dieu 'a employé jusqu’ici l’expression du commandement : « fiat » et qu’il dit en parlant de l’homme : « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance. » Ce tour n’est point indifférent : il marque la pluralité des.personnesdivines, Père, Fils, Saint-Esprit. L’unité reparaît immédiatement dans l’expression : « Et Dieu fit l’homme à l’image de Dieu » en d’autres termes, le Père ne le fit pas à l’image du Fils, ou le Fils à l’image du Père ; autrement l’expression collective « à notre image » n’aurait pas été exacte ; mais Dieu le fit à l’image de Dieu, c’est-à-dire, à sa propre image. Ainsi les deux expressions : « à l’image de Dieu » et « à notre image » comparées entre elles, ne désignent pas l’intervention des trois Personnes comme si elles formaient plusieurs divinités : la première nous fait entendre un seul Dieu, la seconde, les trois Personnes.

CHAPITRE XX. EN QUOI L’HOMME EST-IL FAIT A L’IMAGE DE DIEU QUE LA FORMULE « IL EN FUT AINSI » N’EST PAS EMPLOYÉE DANS LA CRÉATION DE L’HOMME ; ET POURQUOI.


30. Un point essentiel qu’il faut aussi remarquer, c’est qu’après avoir dit : « Faisons l’homme « à notre image » Dieu ajoute immédiatement « Et qu’il commande aux poissons de la mer et « aux oiseaux du ciel » en un mot, à tous les êtres privés de la raison. C’était nous montrer que le trait de ressemblance entre l’homme et Dieu consiste dans le privilège même qui l’élève au-dessus des animaux dépourvus de la raison. Ainsi cette ressemblance consiste dans le don de la raison, de l’intelligence, peu importe le mot. Voilà pourquoi l’Apôtre dit : « Renouvelez-vous dans l’intérieur de votre âme et revêtez l’homme nouveau[2], qui, par la connaissance de la vérité, se renouvelle selon l’image de Celui qui l’a créé[3]; » et par là, il indique nettement que, si l’homme a été fait à l’image de Dieu, le point de ressemblance n’est pas dans la forme du corps, mais dans l’essence immatérielle d’un esprit que la vérité éclaire.
31. Aussi l’Écriture n’a-t-elle point ici employé les formules habituelles : « Cela se fit » et « Dieu fit » elle les a supprimées comme elle l’avait déjà fait pour la lumière primitive, s’il est permis d’entendre par cette expression la lumière de l’intelligence, en communication avec la Sagesse éternelle et immuable de Dieu : c’est un point que j’ai déjà longuement développé. Alors, en effet, le Verbe ne se révélait à aucune créature primitive ; le type éternel ne se reflétait pas dans une intelligence pour se réaliser ensuite en un être d’un ordre inférieur : car, il s’agissait de créer la lumière ou l’intelligence première à qui devait se révéler l’idée de son Créateur, et cette révélation avait pour but de la soustraire à son imperfection pour la diriger vers Dieu, principe de son être et de son perfectionnement. Dans les créations subséquentes, l’Écriture emploie la formule : « cela se fit » ce qui signifie que le dessein du Verbe se produisit d’abord dans la lumière ou l’intelligence primitive ; puis elle ajoute : « Dieu fit donc » telle ou telle œuvre, pour nous apprendre la réalisation sous une forme déterminée de l’être qui avait été appelé à l’existence dans le Verbe divin. Or, la création de l’homme est racontée comme celle de la lumière. « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance » dit Dieu ; puis l’Écriture ajoute immédiatement : « Dieu fit donc l’homme à son image » sans s’arrêter à la formule : « cela se fit. » C’est que l’homme est, comme la lumière primitive, une intelligence, et que, pour l’intelligence, exister, n’est au fond que prendre conscience du Verbe Créateur.
32. Si l’Écriture conservait ici cette double formule, on s’imaginerait que l’idéal de l’homme fut d’abord reflété dans l’intelligence d’une créature raisonnable, puis réalisée dans un être qui n’aurait pas eu le privilège de la raison : or, l’homme étant un être intelligent, avait besoin, pour être créé avec toute sa perfection, d’avoir

  1. Gen. 1, 26-31
  2. Eph. 4, 13,24
  3. Col. 3, 10