privilège, un rapport d’égalité avec tous les autres nombres, non-seulement parce qu’il est un nombre, mais encore parce qu’il devient égal à tout nombre qui lui sert de multiplicateur ? — L’E. C’est indubitable.
14. Le M. Eh bien ! reporte ton attention maintenant sur le nombre de demi-pieds, qui, dans un vers, rendent les membres inégaux entre eux et tu y découvriras une étonnante égalité en suivant le procédé que nous venons d’indiquer. En effet le moindre vers a un nombre inégal de demi-pieds dans les deux membres, puisqu’il se compose de 4 et de 3 demi-pieds, par exemple
Hospes Ille quem vides.
Le premier membre, hospes ille, peut être divisé en deux parties égales, chacune de deux demi-pieds. Le second membre, quem vides, se divise en deux demi-pieds et un demi-pied. Ce rapport de 2 à1 est le même que de 2 à 2, en vertu du rapport d’égalité que soutient, comme nous l’avons démontré, le nombre 1 avec tous les autres nombres. Grâce à ce mode de division le premier membre devient égal au second. Et s’il y a 4 demi-pieds d’une part et 5 de l’autre, comme dans ce vers :
Roma, Roma, cerne quanta sit ;
Cette combinaison n’est plus aussi légitime et elle forme plutôt un mètre qu’un vers, parce que l’inégalité entre les membres est trop grande pour qu’aucun mode de division permette d’établir entre eux un rapport d’égalité. Tu vois bien, je pense, que les ?1 demi-pieds du premier membre se partagent deux à deux, tandis que les cinq derniers se divisent d’abord en 2 demi-pieds et en 3, ce qui détruit tout rapport d’égalité. Car 5 demi-pieds répartis en 2 et en 3 ne sauraient être l’équivalent de 4 demi-pieds, au même titre que 3 demi-pieds partagés en 1 et 2 sont, comme nous venons de le voir dans le moindre vers, l’équivalent de 4. N’y a-t-il dans cette explication rien qui t’échappe où te déplaise ? — L’E. Loin de là, tout me paraît clair et plausible.
15. Examinons maintenant 5 demi-pieds dans un membre et 3 dans l’autre, et prenons pour exemple ce petit vers :
Phaselus fille quem vides ;
Tâchons de découvrir comment cette inégalité cache un rapport véritable d’égalité. Car cette combinaison est, de l’avis de tout le monde, non-seulement un mètre, mais un vers. Ainsi donc après avoir partagé le premier membre en 2 demi-pieds et en 3, le second en 2 puis en 4, réunis les fractions que tu trouves égales dans l’un et l’autre membre, nous en trouvons 2 dans le premier membre et il en reste 2 dans le second ; une dans les3 demi-pieds du premier membre, l’autre dans le demi-pied du second. Nous pouvons donc les réunir puisque le nombre 1 s’associe à tous les nombres et qu’au total 1 et 3 font 4, ce qui équivaut à 2 plus2. Donc, grâce à ce mode de division, 5 demi-pieds d’une part et 3 de l’autre, s’assemblent dans un accord harmonieux. — Mais dis-moi si tu as compris. — Le M. J’ai compris et je suis tout à fait de ton avis.
CHAPITRE VIII.
16. Nous avons maintenant à parler du rapport de 5 à 7 demi-pieds dans les vers : les plus connus de cette espèce sont le vers héroïque et le vers de six pieds qu’on appelle iambique. Le vers :
Arma virumque cano Trojae qui primus ab oris ;
se partage en deux membres dont le premier se compose de 5 demi-pieds, arma virumque cano; le second de 7 : Trojae qui primus ad oris. Quant à celui-ci :
Phaselus fille quem videtis, hospites.
il a pour premier membre : Phaselus ille, c’est-à-dire 5 demi-pieds ; pour second membre ; Quem videtis, hospites, c’est-à-dire, 7 demi pieds. Cependant ces vers si renommés ne sont point irréprochables au point de vue de l’égalité des membres.
Car si nous partageons les5 premiers demi-pieds en 2 et en 3, les7 derniers en 3 et en 4, les fractions de 3 demi-pieds seront sans doute dans un juste rapport. Si les deux autres fractions pouvaient être dans un rapport tel que l’une d’elles se composât d’un demi-pied et l’autre de 5, elles s’uniraient entre elles d’après le principe qui permet d’associer le nombre 1 à