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CHAPITRE VII.

DU TRIBRAQUE : COMBIEN DE MÈTRES PEUT-IL FORMER

8. L’E. Je n’ai plus rien à demander sur le spondée : arrivons au tribraque. — Le M. Oui. Mais si les quatre pieds dont nous venons de parler produisent chacun quatorze mètres, en tout cinquante-six mètres, il faut en attendre plus encore du tribraque. Dans ces mètres en effet, où il y a un silence d’un demi-pied, le silence ne peut se prolonger au-delà d’une syllabe. Mais quand nous observons un silence dans le tribraque, faut-il, à ton avis, que ce silence ne dure qu’une brève, ou qu’il comprenne le temps de deux brèves ? car le tribraque admet ce double mode de division : il commence par une brève et finit par deux ; ou il commence par deux et finit par une. Ainsi le tribraque donne nécessairement naissance à vingt et un mètres. — L’E. C’est fort vrai. Le moindre mètre est en effet de 4 brèves avec un silence de deux temps : viennent ensuite les mètres de 5 brèves avec un silence d’un temps ; celui de 6 brèves, sans silence ; de 7 brèves, avec un silence de deux temps ; de 8 brèves avec un silence d’un temps ; de 9 brèves, sans silence. Et si on continue ainsi jusqu’au nombre de 24 syllabes, qui forment 8 tribraques, on a un total de 21 mètres.

Le M. Tu as calculé juste et avec aisance. Nais crois-tu qu’il soit nécessaire de donner des exemples pour chaque mètre ? Ceux que nous venons de donner pour les quatre premiers pieds[1] ne suffiront-ils pas pour jeter de la lumière sur tous les autres ? — L’E. Ils suffiront, à mon avis du moins. — Le M. C’est ton avis seul que je demande. Une question toutefois ; tu sais que si l’on change le mode de battement dans le pyrrhique, on peut mesurer un tribraque. Or, le premier mètre pyrrhique peut-il admettre le premier mètre du tribraque ? — L’E. Cela est impossible ; car le mètre doit être plus grand que le pied. — Le M. Et le second ? — L’E. C’est possible. En effet quatre brèves font deux pyrrhiques, ou un tribraque plus un demi-pied, là, sans aucun silence, ici, avec un silence de deux temps dans le battement de la mesure. — Le M. Donc, en changeant le mode de battement, tu trouveras dans les pyrrhiques mêmes des exemples de tribraques jusqu’à seize syllabes ; en d’autres termes, jusqu’à cinq tribraques plus un demi-pied, et cela doit te suffire. Car tu peux former tous les autres toi-même, soit en chantant soit en marquant la mesure, si toutefois tu crois nécessaire de soumettre ces combinaisons au jugement de l’oreille. — L’E. Je ferai ce que tu jugeras à propos ; mais voyons ce qui nous reste à examiner.

CHAPITRE VIII.

DU DACTYLE.

9. Le M. Vient maintenant le dactyle. 2 n’admet qu’un mode de division, n’est-ce pas vrai ? — L’E. Oui. — Le M. Quelle partie y est susceptible de silence ? — L’E. La moitié. — Le M. Et si, après avoir m’is un trochée à la suite d’un dactyle, on veut observer le silence d’un temps ou d’une brève qui est nécessaire pour avoir un dactyle complet, que répondre ? Car nous ne pouvons dire que le silence ne doive pas être moindre qu’un demi-pied, la raison exposée plus haut nous ayant démontré que ce silence, loin de ne pas égaler, devait au contraire dépasser la durée d’un demi-pied. Dans le choriambe, en effet, le silence est moindre qu’un demi-pied, quand on fait suivre le choriambe d’un bacchius ; exemple : fonticolae puellae. Car tu reconnais que nous mettons ici un silence équivalent à une brève et nécessaire pour compléter les six temps. — L’E. Tu as raison. — Le M. Si donc nous mettons un trochée après un dactyle, pourrons-nous observer aussi le silence d’un temps ? — L’E. Je suis contraint de l’avouer. — Le M. Et qui t’y contraindrait si tu te rappelais ce que nous avons établi plus haut ? Car tu ne tombes dans cette inconséquence que par oubli du principe démontré tout à l’heure, à savoir, l’indifférence de la finale et le privilège qu’a l’oreille de faire longue la dernière syllabe, fût-elle brève, lorsqu’il reste le temps nécessaire pour l’allonger. — L’E. Je comprends à présent ; car, si l’oreille peut allonger une finale brève, quand il reste un silence, comme le raisonnement et les exemples nous l’ont prouvé, il est tout à fait indifférent de faire suivre le dactyle d’un trochée ou d’un spondée. Ainsi, puisque le retour au commencement du métro, doit être marqué expressément par un silence, il faut, après le

  1. Cf. Chapitre 3, 4, 5, VI.