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que tu verras dans une chose la mesure, le nombre et l’ordre, n’hésite pas à l’attribuer à Dieu, suprême ordonnateur. Si, au contraire, tu les retranches, il rie te restera plus rien. Car en vain il te semblera qu’il reste un commencement de forme, là où tu ne rencontres ni la mesure, ni le nombre, ni l’ordre ; partout où ils sont, la forme est parfaite ; où ils ne sont pas, il ne faut pas supposer même un commencement de forme, qui semblerait être là comme la matière soumise au travail de perfectionnement de l’Ordonnateur. Car si la perfection de la forme est bonne, le commencement de la forme ne sera pas déjà sans quelque bonté. Par conséquent, si tu retranches d’une chose tout bien, il ne restera pas une certaine petite chose, mais il y aura le néant absolu. Or tout bien vient de Dieu. Donc tout être aussi vient de Dieu. Mais ce mouvement de la volonté qui s’éloigne du Dieu suprême, et que nous appelons le péché, est défectueux ; d’un autre côté, toute défectuosité vient du néant ; vois donc à quoi se rattache ce mouvement, et reconnais sans hésiter qu’il ne se rattache pas à Dieu. Cependant comme il est volontaire, il est par là même en notre puissance. Si donc tu le crains, il faut ne pas le vouloir. Et si tu ne le veux pas, il n’aura pas lieu. Quoi de plus rassurant qu’une vie où il ne t’arrivera rien sans que tu le veuilles ? Toutefois, parce que l’homme, tombé de lui-même, ne peut pas de lui-même se relever (1), saisissons cette main droite de Dieu qu’il veut bien nous tendre d’en haut, je veux dire Notre-Seigneur Jésus-Christ, saisissons-le d’une foi ferme, attendons-le avec une espérance certaine, désirons-le d’une charité ardente. Quant à l’origine du péché, peut-être penses-tu qu’il convient de l’examiner davantage ; je crois, pour moi, que cela n’est nullement nécessaire ; mais si tu es d’un autre avis, nous remettrons cette discussion à un autre moment. E. Je veux bien, avec toi, remettre à un autre temps la question soulevée. Mais je ne t’accorde pas qu’elle soit épuisée.

1. Rétr. liv. I, ch. IX, n. 3.

Ces deux premiers livres sont traduits par M. l’abbé DEFOURNY.