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décidé pacifiquement, entre votre sainteté et le vénérable Xantippe, à qui appartient la convocation du concile. Ou bien, ce qui vaudrait encore mieux, convoquez tous les deux, sans préjudice pour l’un ni pour l’autre, convoquez nos collègues, ceux surtout qui se rapprochent de vous par âge d’épiscopat, et ils prononceront aisément sur vos droits ; la question sera ainsi résolue avant toute autre, entre vous en petit nombre.; une fais l’affaire jugée, on convoquera les autres évêques qui, en pareille matière, ne peuvent ni ne doivent s’en rapporter qu’au témoignage de leurs anciens, et qui, maintenant, ignorent lequel de vous deux ils doivent croire. Cette lettre, que je vous envoie, sera scellée avec un anneau représentant la face d’un homme qui regarde par côté.

LETTRE LX.

(401.)

Sur une affaire de discipline.

AUGUSTIN A SON BIENHEUREUX ET VÉNÉRABLE SEIGNEUR, A SON FRÈRE TRÈS-CHER, SON COLLÈGUE DANS LE SACERDOCE, AU PAPE[1] AURÈLE, SALUT DANS LE SEIGNEUR.

1. Depuis que nous nous sommes quittés, je n’ai reçu aucune lettre de votre sainteté. Je viens de lire votre lettre sur Donat et son frère, et longtemps j’ai hésité sur ce que je répondrais. Mais pourtant, après avoir repassé ce qui pouvait être le plus utile au salut de ceux que nous servons dans la vie spirituelle et chrétienne, je n’ai rien trouvé de meilleur, si ce n’est qu’il ne fallait pas ouvrir cette voie aux serviteurs de Dieu[2] et leur laisser croire trop facilement qu’ils sont choisis pour quelque chose de mieux quand leur vertu s’est altérée. Les chutes deviendront faciles aux moines, en même temps que l’ordre des clercs recevra une grande injure, si les déserteurs des monastères passent dans la milice de la cléricature, tandis que nous n’avons coutume d’y admettre que les moines les plus éprouvés et les meilleurs ; on dit vulgairement : « Mauvais joueur de flûte, bon chanteur ; » on dirait de même dans le peuple en se moquant de nous : « Mauvais moine, bon clerc. » Il serait déplorable de pousser les moines à un aussi funeste orgueil ; et de juger dignes d’un tel affront les clercs, dans les rangs de qui nous sommes ; c’est à peine si un bon moine peut faire un bon clerc lorsque, avec un suffisant esprit de mortification, il manque de l’instruction nécessaire ou qu’il présente dans sa personne quelque irrégularité.

2. Votre béatitude est persuadée, je crois, que c’est par ma volonté que Donat et son frère sont sortis de leur monastère, afin de se rendre plus utiles à ceux de leur pays ; mais cela est faux. Ils s’en sont allés d’eux-mêmes, ils ont quitté d’eux-mêmes, malgré nos efforts pour les retenir en vue de leur salut. Et comme Donat a été ordonné avant que nous ayons statué sur ce point dans le concile[3], votre sagesse peut en faire ce qu’elle veut, si par hasard il est corrigé de la perversité de son orgueil. Mais pour ce qui est de son frère, principale cause de la sortie de Donat, vous savez ce que j’en pense, et je n’en dirai rien de plus. Je n’ose contester ni avec votre sagesse, ni avec votre rang, ni avec votre charité ; et j’espère que vous ferez ce qui vous paraîtra le plus utile aux membres de l’Église.

LETTRE LXI.

(101.)

Conduite de l’Église à l’égard des clercs donatistes revenus à l’unité.

AUGUSTIN, ÉVÈQUE, A SON TRÈS-CHER ET HONORABLE FRÈRE THÉODORE, SALUT DANS LE SEIGNEUR.

1. Votre bienveillance m’avait demandé comment nous recevions les clercs du parti de Donat qui se faisaient catholiques ; ce que je vous répondis alors, j’ai voulu le marquer dans cette lettre à votre adresse, afin que, si quelqu’un vous questionnait sur ce point, vous puissiez montrer, écrit de ma main, ce que nous pensons et ce que nous faisons à ce sujet. Sachez donc que nous ne détestons en eux que leur séparation qui les fait schismatiques ou hérétiques, qui les met en dehors de l’unité et de la vérité de l’Église catholique ; ils n’ont point la paix avec le peuple de Dieu répandu sur toute la terre et ne reconnaissent point, hors de leurs rangs, le baptême du Christ.

  1. Saint Augustin, écrivant à Aurèle, évêque de Carthage, lui donne le titre de pape, par respect profond pour lui-même et par considération pour son siège.
  2. Les moines.
  3. Ce fut au concile de Carthage, 13 septembre 401, qu’on prit à l’égard des moines la résolution rappelée ici par saint Augustin.